Aide juridictionnelle : 200 avocats bordelais assignent l'État en référé

Près de 200 avocats du barreau de Bordeaux ont assigné l'État en référé estimant que le projet de réforme de l'aide juridictionnelle est non conforme au droit et présente un risque de dommage « imminent » à leur profession, a-t-on appris auprès des initiateurs.
« Nous sommes partis du constat que les manifestations et les grèves ne sont pas dans notre culture et que c'est au détriment de nos clients », a expliqué Me Philippe Lafaye, confirmant une information du quotidien Sud Ouest et assurant qu'il s'agit de la première initiative du genre.
Les avocats, très exactement 169 cabinets dépendant du barreau de Bordeaux dont trois très importants, soit environ 200 avocats, ont donc délivré mardi cette assignation à l'Agent judiciaire de l'Etat — représentant le ministère de la justice — pour qu'il comparaisse le 15 septembre devant le juge des référés.
Dans le document consulté par l'AFP, ils estiment que le juge doit être saisi« pour prévenir un dommage imminent » et accorder aux avocats une« provision » d'un montant de 6,5 millions d'euros qui sera consignée à la Caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats du Sud Ouest (Carpa), gérant les fonds de l'aide juridictionnelle, afin qu'elle puisse maintenir le financement de celle-ci en 2015. Ils demandent au juge d'ordonner à l'Agent judiciaire de l'Etat de « garantir le financement de toute mission nouvelle éligible à l'aide juridictionnelle que le législateur viendrait à créer ».
La question de la réforme de l'aide juridictionnelle, permettant aux justiciables d'être défendus par un avocat même s'ils n'en ont pas les moyens, a fait l'objet depuis le début du mois de juin de trois grèves nationales d'avocats. Le gouvernement veut réformer cette aide pour lui trouver un mode de financement pérenne après la suppression le 1er janvier 2014 du droit de timbre de 35 euros nécessaire pour engager une procédure et qui servait notamment à financer cette aide.
L'une des pistes évoquées consisterait à appliquer une taxe sur le chiffre d'affaires des cabinets d'avocats, ce que refuse la profession. Les Bordelais estiment que cette taxation serait contraire au droit communautaire car elle entraînerait pour des avocats non Français une entrave à leur liberté d'établissement. Selon eux, elle menace aussi un principe de droit constitutionnel imposant « l'égalité devant l'impôt et les charges fiscales ». Sur le fond, ils déplorent que la France n'arrive qu'à la 37e place « sur les 47 pays membres du Conseil de l'Europe », après l'Azerbaïdjan, concernant le budget de la justice.