Avocats online : La plateforme de consultations juridiques du CNB sera celle de myavocat.fr

Le Conseil national des barreaux (CNB) a décidé d’entrer en négociation avec la société Jurihub pour reprendre sa plateforme de mise en relation myavocat.fr, selon une résolution adoptée vendredi dernier, en lieu et place d’une création ex nihilo qui traîne depuis près d’un an.
Après avoir rappelé qu’il reste attaché à la création d’une plateforme numérique permettant à tous les avocats de délivrer à distance, y compris par téléphone, « des consultations juridiques en toute indépendance vis-à-vis d’opérateurs tiers extérieurs et dans le respect des règles déontologiques et professionnelles », les résultats d’une étude menée sur « l’évolution du projet et l’examen des propositions reçues » pour le lancement de la plateforme annoncée au mois de juillet dernier ont toutefois conduit le CNB à jeter son dévolu sur la plateforme existante myavocat.fr, « conçue, réalisée et exploitée » par la société Jurihub.
L’examen des résultats de l’appel d’offres lors de l’assemblée générale du 3 juillet 2015 concernant la conception et la création de cette plateforme de consultations juridiques à distance avait pourtant abouti à retenir la société Tenqi et son prestataire belge Eyepea qui répondaient « aux spécifications définies dans le cahier des charges établi sous le contrôle de la commission de l’exercice du droit », le CNB expliquant l’an dernier que son choix de confier le développement de la plateforme à ces deux sociétés, dont la seconde garantissait « la réalisation de l’intégralité du projet » en cas de défaillance de la première, était justifié par le fait de ne pouvoir « envisager le rachat d’une plateforme existante à un coût raisonnable ».
Huit mois plus tard, le CNB renonce au développement ex nihilo d’une plateforme de consultations juridiques à distance et annonce se porter acquéreur de cette plateforme existante myavocat.fr appartenant à la société Jurihub, qui exploite également les sites hub-avocat.fr, siteavocat.fr etdeskavocat.fr, et qui, à défaut d’être la meilleure, est sans doute cédée à « un coût raisonnable ». Est-ce le rôle du CNB de mettre la main à tout prix sur une plateforme de consultations juridiques s’il n’en a ni les compétences techniques ni les moyens financiers ?
La démarche peut sembler d’autant plus singulière que le CNB n’en est pas à sa première tentative d’incursion du net et que les deux échecs précédents ne lui ont guère servi de leçon. En juillet 2007 déjà, le CNB a porté sur les fonds-baptismaux la plateforme de blogs avocats.fr qui n’a suscité qu’un intérêt limité parmi 1 ou 2 000 avocats sur les 65 000 que compte la profession et elle n’est à présent plus que l’ombre d’elle-même après avoir été transférée d’un prestataire à un autre pour en limiter le coût qui, à raison de 60 000 euros par an, était jugé excessif.
Myavocat.fr génère automatiquement une présentation standardisée ni modifiable ni supprimable de l’avocat
Plus récemment, au mois de novembre 2013, le CNB s’est porté acquéreur de la plateforme vox-avocats.fr pour un euro symbolique et y a consacré 35 000 euros pour en faire ce qui était supposé devenir « le » réseau « officiel » des avocats. La greffe n’a jamais pris et le dernier post sur le fil d’actualité date de près de deux ans, il est signé par l’avocat marseillais Jean de Valon qui s’en prend, de manière véhémente, au président Jean-Marie Burguburu et à l’Institution elle-même pour leur reprocher des décisions incohérentes, sans consultation ni mise en concurrence, concernant la blogosphère, le RPVA et Vox-avocats.
Un avocat sollicité par LexTimes.fr nous explique s’être inscrit sur myavocat.fr le surlendemain de l’annonce du CNB et avoir été éminemment surpris de constater que le site génère automatiquement une présentation standardisée de l’avocat, telle que « Maître […] est avocat inscrit au Barreau de Paris. Ses domaines de compétences principaux sont en Droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, Droit des sociétés et Droit pénal. L'approche personnalisée mise en œuvre par Me […] permet d'assurer une prestation de conseil à valeur ajoutée et une représentation en justice de qualité devant les tribunaux. Maître […] accorde une importance toute particulière à l'écoute et au dialogue, et vous aide à faire valoir vos droits en toute confidentialité et sécurité juridique », sans qu’il soit possible de la modifier ou de la supprimer.
Quant aux honoraires que sont autorisés les avocats à facturer, ils sont apparemment « encadrés ». La consultation par téléphone de 10 minutes doit ainsi être fixée dans une fourchette comprise entre 20 et 40 € TTC, la réponse de 10 lignes à une question simple entre 15 et 50 €, la réponse plus élaborée de 30 lignes à une question avec une pièce jointe est tarifée entre 80 et 300 € et le premier rendez-vous cabinet de 30 minutes se situe entre 30 et 300 €, les frais de mise en relation étant de 6 € TTC pour les trois premières prestations et 12 € TTC pour le rendez-vous cabinet. Une tarification standardisée et imposée qui est manifestement contraire à l’indépendance et la déontologie de la profession, nous explique un avocat parisien et le CNB ne semble en avoir cure, ajoute-t-il.
Éventuelle reprise de @myavocat par @CNBarreaux conditionnée par modifications fonctionnelles - vérifiez vos infos @LexTimesfr #avocat
— Roland Rodriguez (@Rolan_Rodriguez) 21 Février 2016
Roland Rodriguez, vice-président du CNB, conteste la « qualité » de nos informations et assure via son compte Twitter qu'il ne s'agit que d'une « reprise éventuelle » conditionnée par des « modifications fonctionnelles ». On est rassurés mais LexTimes.fr n'a rien affirmé d'autre en dévoilant le contenu de la résolution du 12 février 2016 selon laquelle « le Conseil national des barreaux (CNB) a décidé d’entrer en négociation avec la société Jurihub pour reprendre sa plateforme de mise en relation myavocat.fr » et que cette plateforme n'est pas conforme à la déontologie de la profession d'avocat.