Avocats : 141 barreaux sur 164 en grève contre la réforme de l'AJ

La grève des avocats contre le projet de réforme de l'aide juridictionnelle (AJ) est suivie par la quasi-totalité des barreaux de France, tandis que le mouvement s'est durci à Paris, une semaine après son début.
Le mouvement de grève, qui consiste à ne pas désigner d'avocats commis d'office, était suivi lundi par « 141 des 164 barreaux de France », a indiqué le Conseil national des barreaux (CNB) qui demande un rendez-vous à la ministre de la justice, Christiane Taubira, et a d'ores et déjà prévu lors de son assemblée générale de vendredi de mettre au vote « une délibération sur un mouvement de grève générale dans toute la France et de manière illimitée ».
À Paris, le mouvement s'est durci lundi, avec un appel à ne plus plaider. « C'est la pagaille, tout prend du retard, les affaires sont renvoyées », a déclaré le bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sur, qui a « fait le tour de plusieurs chambres » au palais de justice de Paris. « Nous verrons ce soir si nous reconduisons le mouvement demain. Il y a toutes les chances que ce soit le cas », a-t-il ajouté.
L'aide juridictionnelle (AJ) permet aux plus démunis d'accéder aux services d'un avocat. La garde des sceaux a présenté une réforme de l'AJ qui prévoit notamment un relèvement du plafond de revenus pour les bénéficiaires, une refonte du barème de rémunération des actes et une participation des barreaux au financement. Pomme de discorde avec la profession, l'article 15 du projet de loi de finances voté jeudi soir qui prévoit, entre autres, un prélèvement de cinq millions d'euros en 2016 et dix millions d'euros en 2017 sur les intérêts de fonds placés dans les Carpa gérées par les avocats.
Les avocats, qui ont fustigé un « passage en force » de la ministre, dénoncent aussi une baisse globale des revenus des robes noires, avec une baisse du nombre d'unités de valeurs (UV) attribuées aux principaux actes comme les divorces, les prud'hommes, les gardes à vue — qui passent, par exemple, de 300 euros à 180 pour 24 heures, « inférieur au Smic horaire », se plaint une avocate.
Selon un document de travail de la chancellerie, le nombre d'UV par procédure est revu à la baisse dans près de 60 % des cas. Du côté du ministère, on assure que « les portes de la chancellerie n'ont jamais été fermées et restent ouvertes », rappelant que « 40 réunions se sont tenues sur l'AJ entre décembre 2014 et début octobre 2015 ».
Alors que le CNB a déclaré le dialogue rompu, il y a dix jours, la chancellerie a rappelé qu' « il y avait des discussions en cours sur la revalorisation de l'UV socle (24,2 euros), sur le barème des actes et sur un financement de l'AJ alternatif aux fonds Carpa, sur base des propositions de la profession ».