Avocats : Pas de signe distinctif avec la robe

Un avocat arborant une décoration.
Un avocat arborant une décoration.

Le conseil de l’ordre d’un barreau peut interdire de porter avec la robe d’avocat tout signe manifestant une appartenance ou une opinion religieuse, philosophique, communautaire ou politique, a jugé la première chambre civile de la Cour de cassation à l’occasion d’un recours formé par une élève-avocate voilée.

En l’espèce, par une délibération du 24 juin 2019, le conseil de l’ordre des avocats au barreau de Lille a modifié l’article 9.6 de son règlement intérieur en y ajoutant un cinquième alinéa selon lequel « l’avocat ne peut porter avec la robe ni décoration ni signe manifestant ostensiblement une appartenance ou une opinion religieuse, philosophique, communautaire ou politique » et directement visée par cette disposition, Sarah Asmeta, une élève-avocate inscrite à l’Institut de formation des avocats du Nord-Ouest, ainsi que son maître de stage, Medhi Ziatt, ont formé un recours à l’encontre de cette délibération déclaré irrecevable par le juge d’appelDouai, 9 juill. 2020, Sarah Asmeta et Medhi Ziatt c/ Conseil de l’ordre des avocats au barreau de Lille. pour ce qui est de la première qui n’avait pas (encore) la qualité d’avocat et infondé quant au second.

La première chambre civile de la Cour de cassationCiv. 1ère, 2 mars 2022, n° 20-20185, Sarah Asmeta et Medhi Ziatt c/ Conseil de l’ordre des avocats au barreau de Lille. rejette le pourvoi en confirmant l’absence de recours dont dispose une élève-avocate et le caractère non discriminatoire de la délibération attaquée.

S’agissant du recours formé par Mme Asmeta, la Cour rappelle que selon les dispositions législatives et réglementaires applicables en la matière, seuls le procureur général ou un avocat s’estimant lésé dans ses intérêts professionnels peut déférer à la cour d’appel une décision ou une délibération du conseil de l’ordre et une élève-avocate — qui n’est pas avocat et ne porte donc pas la robe — n’a donc pas qualité pour agir en contestation d’une délibération d’un conseil de l’ordre.

Quant à Me Ziatt, qui n’avait pas soutenu devant les premiers juges qu’il serait titulaire d’une décoration, il n’est pas recevable, faute d’intérêt personnel et direct, à critiquer la délibération litigieuse en ce qu’elle interdit à l’avocat de porter toute décoration sur la robe et il n’est pas davantage recevable, toujours faute d’intérêt personnel et direct, à invoquer « un désavantage particulier et disproportionné pour les femmes musulmanes » pouvant résulter de la délibération litigieuse.

Pour le surplus, le Conseil national des barreaux étant muet sur ce point, un conseil de l’ordre est jugé compétent à édicter une telle mesure jugée non discriminatoire, adéquate et tout à fait proportionnée à l'objectif poursuivi qui est la neutralité de l'avocat.