Conflit d'intérêts : David Boies, avocat de Harvey Weinstein et du New York Times

Harvey Weinstein devant le New York Times
Harvey Weinstein devant le New York Times. DR

Le quotidien New York Times et l’hebdomadaire New Yorker révèlent avoir été l’objet de manœuvres de la part d’un réseau de détectives, d’avocats et d’anciens agents du Mossad recrutés par le magnat du cinéma déchu Harvey Weinstein pour les empêcher de publier le mois dernier leurs enquêtes sur des allégations de harcèlement sexuel et d’agression le concernant.

Et parmi l’armada d’avocats, écrit Jim Rutenberg dans un article publié ce matin (« Report details Weinstein’s attempt to hide accusations », New York Times), David Boies, du cabinet Boies Schiller Flexner LLP, qui se trouve être le rédacteur du contrat — publié hier sur le site du New Yorker — de l’un des trois cabinets de détectives, Black Cube, missionnés par M. Weinstein pour lui fournir « l’aide nécessaire pour arrêter définitivement la publication d’un nouvel article négatif dans un journal new-yorkais » identifié comme le New York Times et… l’un des avocats du quotidien new-yorkais pour lui avoir fourni des conseils juridiques externes dans trois procédures, dont une affaire de diffamation, au cours des dix dernières années et dont deux seraient encore en cours.

Le journal a publié hier soir un communiqué condamnant sévèrement ce conflit d’intérêts et le concours apporté par son (futur ex-)avocat, Me Boies, à M. Weinstein pour tenter de saboter ses enquêtes et affaiblir ses journalistes.

« Nous avons appris aujourd’hui, écrit le New York Times, que le cabinet d’avocats Boies Schiller et Flexner travaillait secrètement pour arrêter notre enquête sur Harry Weinstein alors qu’en même temps les avocats de ce cabinet nous représentent dans certaines procédures ». « Nous considérons cette conduite intolérable, poursuit le journal, un grave sentiment de trahison et une violation des règles professionnelles fondamentales que tous les avocats sont tenus de respecter. C’est inexcusable et nous examinons les recours les plus adéquats ».

Interrogé hier soir sur quoi pourraient porter ces recours, l’avocat habituel du New York Times, David McCraw, a refusé d’en dire davantage mais a indiqué qu’il « pense que ce que [le cabinet Boies] leur doit c’est une explication sur ce qu’il s’est réellement passé », ajoutant simplement « nous avons besoin d’en savoir beaucoup plus ».

De son côté, Me Boies a déclaré au New Yorker que s’il a effectivement participé à la rédaction du contrat, il n’a pas lui-même procédé à la sélection du cabinet de détectives ni dirigé les enquêteurs privés. Et bien qu’il ne pense pas que son travail pour Harvey Weinstein et le fait que son cabinet représente le Times dans des procédures judiciaires caractérisent un conflit, David Boies admet que son cabinet « n’aurait pas dû engager et payer des enquêteurs privés qu’il n’a pas lui-même sélectionné et dirigé ».