Coronavirus : Rejet de la demande de confinement total

Le juge des référés du Conseil d'Etat a rejeté la demande de confinement total de la population sollicitée par le syndicat Jeunes Médecins mais enjoint au gouvernement de préciser la portée ou de réexaminer certaines des dérogations au confinement actuellement en vigueur.
Le syndicat avait demandé jeudi dernier, 19 mars, au juge des référés du Conseil d'Etat d'enjoindre au gouvernement de « prononcer un confinement total de la population » et de « prendre les mesures propres à assurer la production à échelle industrielle de tests de dépistage et le dépistage des personnels médicaux ». S’étaient joints à la requête l'InterSyndicale nationale des internes et le Conseil national de l'ordre des médecins.
À l’occasion d’une audience exceptionnelle qui s’est tenue hier, dimanche, au Palais-Royal et qui a duré environ 2 heures 30, des mesures de sécurité avaient été mises pour garantir un espacement minimal entre les personnes présentes et, pour la première fois, a été utilisé, à la demande des requérants, un dispositif de visioconférence.
Statuant en formation collégiale de trois juges présidée par le président de la Section du contentieux, le juge des référés du Conseil d'Etat
Un confinement total, relève le juge des référés, pourrait avoir « des implications graves pour la santé de la population » car, souligne-t-il, le ravitaillement à domicile ne peut être organisé sur l'ensemble du territoire national, compte tenu des moyens dont l'administration dispose, sauf à risquer de graves ruptures d'approvisionnement et à retarder l'acheminement de matériels indispensables à la protection de la santé. De plus, poursuit le juge de l’urgence, la poursuite de certaines activités essentielles, telles que celle des personnels de santé ou des personnes participant à la production et à la distribution de l'alimentation, implique « le maintien d'autres activités dont elles sont tributaires », notamment le fonctionnement, avec des fréquences adaptées, des transports en commun.
Cela dit, selon le juge des référés, certaines mesures déjà prises méritent d’être mieux précisées par le gouvernement. Il en va ainsi du décret du 16 mars 2020 du premier ministre interdisant le déplacement de toute personne hors de son domicile, sous réserve d'exceptions limitatives, tenant à diverses nécessités, avec la possibilité, pour le représentant de l'État dans le département d'adopter des mesures plus strictes si des circonstances locales l'exigent.
Si l'économie générale de ces mesures ne révèle pas une carence des autorités publiques, la portée de certaines dispositions présente « un caractère ambigu » au regard en particulier de la teneur des messages d'alerte diffusés à la population, telle, par exemple, la dérogation pour les « déplacements pour motif de santé », sans autre précision quant à leur degré d'urgence. De même, pour la dérogation pour les « déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective, et aux besoins des animaux de compagnie » qui apparaît trop large, notamment en rendant possibles des pratiques sportives individuelles, telles le jogging, ou de celle permettant le fonctionnement des marchés ouverts, sans autre limitation que l'interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes, dont le maintien paraît autoriser dans certains cas « des déplacements et des comportements contraires à la consigne générale ».
Il est dès lors enjoint au gouvernement de prendre dans les 48 heures des mesures tendant à « préciser la portée de la dérogation au confinement pour raison de santé », de « réexaminer, dans le même délai le maintien de la dérogation pour ‘déplacements brefs, à proximité du domicile’ compte tenu des enjeux majeurs de santé publique et de la consigne de confinement » et d’ « évaluer les risques pour la santé publique du maintien en fonctionnement des marchés ouverts, compte tenu de leur taille et de leur niveau de fréquentation ».
Quant aux mesures relatives au dépistage, le juge des référés relève que les autorités ont pris les dispositions avec l'ensemble des industriels en France et à l'étranger pour augmenter les capacités de tests dans les meilleurs délais. La limitation, à ce jour, est-il précisé, des tests aux seuls personnels de santé présentant des symptômes du virus résulte d'une insuffisante disponibilité des matériels.