Cour de cassation : Audience solennelle de rentrée

Vendredi dernier s’est tenue l’audience solennelle de début d’année de la Cour de cassation à laquelle avaient été conviés de nombreuses personnalités.
La cour de cassation a enregistré environ 28 000 pourvois en 2016, un nombre quasi identique à celui de l’année précédente, mais elle en a jugé un peu plus de 29 000, diminuant ainsi légèrement le stock dont le délai de roulement s’établit à environ 14 mois en matière civile et 6 mois en matière pénale, a indiqué le premier président Bertrand Louvel qui a tiré la sonnette d’alarme sur plusieurs centaines de postes vacants au sein des cours d’appel. « La direction des services judiciaires du ministère de la justice m’a saisi […] d’une demande tendant à différer l’installation de conseillers nommés à la Cour de cassation afin de ne pas placer certaines cours d’appel en difficulté », a-t-il précisé.
Le premier président a fait état de l’ascendant pris par la Cour européenne des droits de l’homme et de l’arrêt rendu en fin d’année par l’assemblée plénière en matière de liberté d’expression permettant qu’un avocat puisse « critiquer publiquement les comportements des juges qui leur paraissent discutables » sans pour autant pouvoir en déduire que les rapports entre juges et avocats « sont désormais libérés de tout contenu déontologique ». Le moment est sans doute venu, s’interroge M. Louvel, que magistrats et avocats « se penchent ensemble sur la question de leur déontologie commune dans leurs rapports mutuels […] et que les représentants des deux professions s’en saisissent davantage d’une manière volontariste et constructive ».
La prochaine mise en ligne de toutes les décisions de l’ordre judiciaire devrait, prophétise le premier président Louvel, « transformer profondément les professions de juge et d’avocat ». La libre confrontation de l’ensemble des décisions rendues devrait en effet conduire les juges à « s’harmoniser davantage dans des démarches intellectuelles plus collectives et moins individualistes, mieux comprises […] par les citoyens et beaucoup plus prévisibles par les avocats qui pourront développer la culture du règlement des litiges extérieur au juge ».
Le procureur général Jean-Claude Marin a rendu un hommage à Pierre Arpaillange (1924-2017), décédé deux jours plus tôt, qui, à 19 ans, est entré dans la résistance et a exercé les fonctions les plus prestigieuses au sein de la magistrature judiciaire : directeur des affaires criminelles et des grâces (1968-1974), procureur général près la Cour de cassation (1984-1988), ministre de la justice (1988-1990) et premier président de la Cour des comptes (1990-1993).
M. Marin est revenu à mi-mots sur les propos présidentiels « dévalorisants, méprisants et outrageants » qu’il est « insupportable d’entendre ou de lire » pour regretter que « la légèreté dans le traitement de l’autorité judiciaire et de sa Cour suprême, ne peut qu’alimenter l’image d’une justice dévalorisée, ravalée au rang d’administration subalterne, et entamer la confiance qu’elle doit susciter chez les citoyens ».