Crowdfunding : Unilend jette l’éponge et aucun repreneur en vue

La rumeur insistante selon laquelle la plateforme de financement participatif Unilend serait en cessation de paiement « circulait » depuis plusieurs jours. Dans un mail adressé en fin de matinée à tous ses clients prêteurs et dont LexTimes a pu prendre connaissance, la société annonce qu’elle « cesse ses activités » et confie à la SFPMEI « le soin de gérer [les] prêts et [les] opérations jusqu’au terme [du] dernier prêt en cours ».
« Le précurseur du crowdlending en France, Unilend, aurait déclaré sa cessation de paiement fin septembre [… et] faute de repreneur, la plateforme serait en attente d’une décision du tribunal de commerce la plaçant en liquidation judiciaire », écrivait hier Mathieu sur le site spécialisé crowdlending.fr en estimant qu’à la supposer vraie, cette rumeur ne serait pas une « annonce […] étonnante compte tenu des faibles montants collectés par la plateforme depuis plusieurs mois ».
Sur son site, Unilend revendique 427 projets financés depuis son lancement en 2013 et 15 277 prêteurs « actifs » à ce jour mais il n’y a effectivement aucun projet financé depuis le 25 septembre 2018, seulement six projets sur le mois de septembre 2018 pour un montant total de 452 500 euros, trois en août pour 290 000 euros, trois en juillet pour 380 000 euros et six en juin pour 590 000 euros, soit une collecte de 1,7 million d’euros au titre des cinq derniers mois qui a dû générer, à raison d’une commission de 4 %, un chiffre d’affaires de 68 500 euros qui est nettement insuffisant pour couvrir ne fût-ce que les salaires des 16 collaborateurs sans compter toutes les autres charges d’exploitation. Les comptes d'Unilend ne sont pas disponibles sur infogreffe.fr.
Le rapport d’activité pour l’année 2017 fait état de 85 projets financés pour 6,86 millions d’euros, soit un chiffre d’affaires insignifiant estimé de 274 269 euros pour l'année écoulée, représentant 17 142 euros pour chacun des 16 collaborateurs et un taux d’impayé qui s’élève à 4,04 % à fin décembre 2017, qui réduit par ailleurs à peau de chagrin la rémunération des prêteurs. « Le dernier prêt effectué sur la plateforme Unilend, nous dit un prêteur, remonte au 4 mai dernier et depuis cinq mois, je retire systématiquement tout ce qui est disponible à la fin du mois ».
Dans le mail adressé ce matin aux prêteurs, Unilend assure que « rien ne change », l’argent n’ayant « jamais transité sur [ses] serveurs ni sur [ses] comptes bancaires » mais déposé sur les comptes de la SFPMEI (Société Financière du Porte-Monnaie Electronique Interbancaire) qui va donc prendre le relai quant aux remboursements et s’occuper également des procédures de recouvrement et des procédures collectives initiées ou à initier contre les emprunteurs mauvais payeurs, sans que cela coûte quoi que ce soit, en plus, aux prêteurs, affirme Unilend qui justifie la cessation de ses activités par l’abondance de liquidités qui permet à présent aux banques de « prêter de plus en plus aux entreprises à des taux d’intérêt toujours plus faibles » et ces taux anormalement bas depuis 2015 ne lui permettent pas « d’espérer rémunérer correctement le risque pris par les prêteurs tout en finançant suffisamment d’emprunteurs pour assurer [sa] rentabilité ».
Un aveu d’échec bien tardif puisque le modèle de prêt participatif est basé sur des prêts sans garantie à des taux élevés de 4 à 10 %, majorés d’une commission de mise en place de 4 % et d’une commission de remboursement de 1 %, soit un taux commissions comprises oscillant entre 9 et 15 % à un moment où les taux à court terme étaient et sont négatifs depuis plusieurs années déjà. Après l'échec de Finsquare, reprise par Lendix au mois d'avril 2016, Unilend est la deuxième plateforme de financement participatif à jeter l'éponge mais aucun repreneur en vue malgré les 12 millions d'euros levés auprès de ses quatre actionnaires prestigieux (Bpifrance, Ventech, 360 Capital Partners et NewAlpha AM) qui préfèrent sans doute perdre ce qu'ils y ont investi plutôt que perdre davantage.