CSM : La hiérarchie doit réagir publiquement aux attaques contre les magistrats

Le Conseil supérieur de la magistrature a estimé vendredi que les attaques contre des magistrats étaient« potentiellement ravageuses » et a invité la hiérarchie à réagir publiquement en pareil cas, dans un avis sollicité par la garde des sceaux en mars 2013 suite aux propos tenus par Henri Guaino contre le juge Gentil.
Le 22 mars 2013, le député UMP Henri Guaino avait estimé à l'antenne d'Europe 1 qu'en mettant en examen Nicolas Sarkozy, la veille, pour « abus de faiblesse » au préjudice de l'héritière du groupe L'Oréal, Liliane Bettencourt, le juge d'instruction de Bordeaux, Jean-Michel Gentil, avait « déshonoré la justice ». « Je conteste la manière dont il a fait son travail », avait lancé celui qui fut conseiller spécial à l'Élysée, « je la trouve indigne, je trouve qu'il a déshonoré un homme, les institutions, la justice ».
M. Guaino a été relaxé le 27 novembre par le tribunal correctionnel de Paris, devant lequel il était poursuivi pour outrage à magistrat et discrédit jeté sur une décision de justice. Le parquet a fait appel de ce jugement.
Quelques jours après les déclarations de M. Guaino, la ministre de la justice, Christiane Taubira avait saisi le CSM pour avis sur les « conséquences » de propos tenus « par plusieurs personnalités politiques » — notamment Jean-François Copé, Nadine Morano et Nathalie Kosciusko-Morizet — sur « le bon fonctionnement de l'institution judiciaire et la sérénité de la justice ».
Dans un avis de neuf pages publié vendredi, le CSM constate, de manière générale, que des « attaques [visant des magistrats] dans des affaires en cours sont potentiellement ravageuses ». Elles le sont d'autant plus, selon l'instance garante de l'indépendance de l'autorité judiciaire, « que ces derniers ne peuvent, par nature, ni contre-attaquer, ni se défendre, ni même prendre simplement la parole ou la plume pour expliquer la réalité de leurs actions », sans courir le risque de faire l'objet d'une procédure de récusation.
Dès lors, dans la mesure où le CSM ne peut s'auto-saisir ou être saisi par un magistrat, « le moyen le plus adapté pour éviter que de telles attaques aient un effet "destructeur" [selon le terme employé par la Cour européenne des droits de l'homme] pourrait consister en une déclaration publique du chef de juridiction ou du chef de cour, selon les circonstances, pour rappeler les principes régissant l'action de la justice », selon l'avis.