Droit : Affrontement notaires/avocats pour la justice du 21e siècle

Rien ne va plus entre les avocats et les notaires. Les avocats lorgnent sur l’immobilier des notaires et ont obtenu du législateur l’acte d’avocat, un succédané de l’acte notarié. Sous prétexte de désengorger les tribunaux, les notaires ne sont pas en reste et veulent devenir une chambre d’enregistrement ou un juge de paix, ce que n’apprécient guère les avocats qui ne veulent rien céder de leur territoire juridico-judiciaire et, au contraire, veulent étendre et développer leur périmètre pour réduire le contentieux par une consultation préalable obligatoire à toute action. Les deux fourbissent donc leurs armes pour « la justice du 21e siècle »actuellement en débat et tous deux ont présenté des propositions que les uns et les autres critiquent mutuellement. On attend le coup de sifflet mais en attendant…
C’est ainsi que dans le Monde d’hier daté d’aujourd’hui, le conseil supérieur du notariat (CSN) s’est offert une pleine page de publicité pour dénoncer les propositions du conseil national des barreaux (CNB) qui ne seraient qu’ « une nouvelle édition d’un catalogue maintes fois publié des prétentions d’un barreau à vouloir tout accaparer, et notamment les dossiers qui pourraient encore accroître les revenus des cabinets les mieux dotés ».
Pour le CSN, les propositions contenues dans le livre blanc
« L’avocat devenu passage obligé pour toute action [… dispose] désormais d’un acte doté des attributs de l’acte notarié », regrette le CSN qui s’insurge contre cet « avocat omniscient » qui voudrait à présent imposer un « acte de procédure d’avocat » et une « consultation rémunérée obligatoire à toute action juridique ou judiciaire avec bénéfice de l’aide juridictionnelle sous conditions de ressources » financée par une « nouvelle taxe sur les mutations immobilières et les cessions des fonds de commerce ». Il est clair que l’acte d’avocat lui est resté en travers de la gorge et que cette idée de « consultation obligatoire pour toute action » l’horripile au plus haut point.
Les deux frères ennemis développent depuis plusieurs années des actions de lobbying tous azimuts pour parvenir légalement à empiéter sur les prérogatives séculaires de l’autre et à force de se bouffer la laine, il est normal que l’un ou l’autre prenne un peu froid en hiver et qu’il crie très fort pour que cela cesse… avant qu’ils ne tombent, peut-être, un jour, dans les bras l’un de l’autre et finissent par se marier pour mettre un terme à leurs chamailleries.
Ce n’est sans doute pas pour demain et que propose donc aujourd'hui le CSN dans ses 18 propositions
Les notaires voudraient ainsi que le pacs soit un « contrat solennel obligatoirement dressé, reçu et enregistré par un notaire » alors qu’aujourd’hui le pacs peut être conclu par acte sous seing privé ou acte notarié et les 17 autres propositions vont dans le même sens : adoption de l’enfant du conjoint par seul acte notarié, suppression de la procédure d’envoi en possession par un constat de notaire, passer devant un notaire pour renoncer à une succession, démariage devant notaire au lieu de l’actuelle procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel, confier le changement de régime matrimonial aux notaires, faire du notaire un juge de paix en matière de « litiges liés à la vie courante » (rapports de voisinage, recouvrement de petites créances, baux, obligations diverses,…), autoriser l’apostille par le président de la chambre des notaires, vente aux enchères par renvoi devant notaire,… Sacrés énergumènes !