Écoutes téléphoniques : De la confidentialité des échanges entre un avocat et son bâtonnier

Thierry Herzog. Capture d'écran.
Thierry Herzog. Capture d'écran.

Le bâtonnier de Paris Pierre-Olivier Sur proteste contre l’écoute et la retranscription de conversations qu’il a eues avec son confrère Thierry Herzog dans un dossier d’instruction de ce dernier.

En marge du dossier pour « trafic d’influence » ayant conduit au placement en garde à vue et à la mise en examen de l’ancien chef de l’État Nicolas Sarkozy, de Me Herzog et de l’avocat général à la Cour de cassation Georges Azibert, le bâtonnier de Paris dit avoir appris avec « consternation » qu’une conversation qu’il avait lui-même eue avec Maître Thierry Herzog « avait été écoutée et retranscrite dans un dossier d’instruction concernant cet avocat » et juge, dans un communiqué diffusé hier soir, cette pratique « inadmissible ».

« Les conversations entre un avocat et son bâtonnier doivent être regardées comme couvertes par le secret le plus absolu », affirme le bâtonnier Sur pour qui l’avocat doit pouvoir « se confier à son bâtonnier sans craindre que ses propos soient retranscrits voire utilisés contre lui ». Le bâtonnier, ajoute-t-il, est le confident naturel de tous les membres de son barreau et les conversations qu’il entretient avec eux « ne sauraient en aucune façon être divulguées ».

N’étant pas partie à la procédure, Me Sur constate qu’il ne peut exercer aucune voie de recours à l’encontre de cette retranscription et invite « l’ensemble des protagonistes à faire respecter » le secret le plus absolu dont devraient bénéficier, selon lui, les échanges entre un avocat et son bâtonnier.

Même son de cloche du côté de la rue de Londres qui parle, par la voix de son président Jean-Marie Burguburu « scandalisé », de « détournement de procédure [qui] viole à la fois la confidentialité indispensable d’une conversation entre avocats et celle des relations entre un avocat et le bâtonnier de son ordre » et réclame du législateur qu’il confirme « le caractère inviolable des conversations entre un avocat et son bâtonnier, dans le projet de réglementation nouvelle du secret professionnel promise par le président de la République le 20 mars dernier ».

Les échanges entre l’avocat et les autorités ordinales ne sont pas confidentiels, a en effet jugé, il y a un peu moins de deux ans, la première chambre civile de la Cour de cassation1 qui a annulé les dispositions du règlement intérieur du barreau de Paris qui affirmaient le contraire. En l’état, un recours à l’encontre de cette retranscription serait donc voué à l’échec en l'absence de fondement juridique et de cette jurisprudence qui dit exactement le contraire.

 

  • 1. Civ. 1re, 22 sept. 2011, n° 10-21219, Bâtonnier de l’ordre des avocats à la cour d’appel de Paris c/ A.