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Féminicides : Un "suivi renforcé" pour les auteurs de violences conjugales

Par Nicolas de Will | LEXTIMES.FR |
Tribunal correctionnel de Saintes Tribunal correctionnel de Saintes

Le parquet de la Charente Maritime a annoncé expérimenter au tribunal correctionnel de Saintes un dispositif « innovant » de prise en charge des auteurs et des victimes de violences conjugales, inspiré d’une pratique canadienne issue de la justice « restaurative » qui a été autorisée par le législateur de 2014 et codifiée à l’article 10-1 du code de procédure pénale.

Après un an de préparation et d’identification des partenaires (police et gendarmerie, barreau de Saintes, associations d’aide aux victimes et socio-judiciaires, hôpitaux, pôle emploi et communautés d’agglomération de Saintes et de Royan) associés à cette initiative, le dispositif a été mis en œuvre à compter du 16 septembre 2019 et un premier prévenu a été intégré dès vendredi dernier à cette expérimentation.

Pour éviter les passages à l’acte et éradiquer les féminicides, l’objectif poursuivi est de mieux prendre en charge les auteurs et les victimes de violences conjugales en complément de ce qui existe déjà (TGD-Téléphone grave danger, éviction du conjoint violent, ordonnance de protection) voire expérimenté par d’autres juridictions tel que, par exemple, le bracelet anti-rapprochement par le tribunal de Pontoise.

Dans un premier temps, ce sont les auteurs avec un profil addictif (violences, stupéfiants, alcool,…) qui sont ciblés et les victimes disposeront des coordonnées d’un agent « chargé du suivi » à qui elles pourront signaler tout « manquement de l’auteur à ses obligations ou aux interdictions fixées » dans le cadre du contrôle judiciaire et du « suivi renforcé ». Cet agent chargé du suivi a été recruté, sous le contrôle du parquet, par l’association Enquête et Médiation et le financement est assuré par les communautés d’agglomération concernées, le Fonds interministériel de lutte contre la délinquance (Fidp) et la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca). Tous les élus, et notamment les maires, sont impliqués dans l’expérimentation et peuvent « détecter et signaler » tous les cas de violences conjugales dont ils auraient connaissance.

Sous réserve de validation par le juge des libertés et de la détention (JLD), les parquetiers de Saintes pourront soumettre l’auteur de violences conjugales, avant jugement par le tribunal correctionnel, à un « processus de réparation du trouble causé » par l’infraction ainsi qu’à un contrôle « strictement encadré des obligations et des interdictions » prévues par le parquet ou le juge en cas de contrôle judiciaire. Parmi les obligations qui pourront être imposées dans le cadre de ce « suivi renforcé » : suivre des soins, réparation le préjudice et répondre aux convocations de l’agent charge du suivi et des magistrats du parquet et quant aux interdictions, il pourra s’agir de ne pas résider au domicile de la victime ou de ne pas y paraître, de ne pas entrer en relation avec la victime et de ne pas détenir d’arme.

La justice dite restaurative nécessite toutefois, en très grande partie, la collaboration active et indéfectible de l’auteur de l’infraction mais si cela permet de sauver ne fusse qu’une vie, cela vaut bien évidemment la peine d’essayer. Le premier alinéa de l’article 10-1 du code de procédure pénale dispose en effet que « À l'occasion de toute procédure pénale et à tous les stades de la procédure, y compris lors de l'exécution de la peine, la victime et l'auteur d'une infraction, sous réserve que les faits aient été reconnus, peuvent se voir proposer une mesure de justice restaurative ».

 

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