Fiction ou réalité : La loi de Barbara et celle de Sarkozy

La réalité dépasse parfois la fiction, a-t-on coutume dire lorsqu’on ne connaît pas la réalité du milieu et que la fiction, qui n’est qu’une fiction, est supposée être à mille lieues de la réalité et n'est là que pour amuser le public et faire recette. Pas si sûr.
Dans la fiction d’hier soir sur France 3, Barbara Malo du cabinet Deslandes Malo & Associés, une avocate sexagénaire de province arrivée dans la profession sur le tard à la suite et à cause du décès de son fils camé dont elle se croit toujours responsable depuis une vingtaine d’années pour lui avoir refusé quelques billets, quelques billets refusés qui auraient conduit le gosse à voler, à se faire condamner aux assises pour meurtre et à se suicider quelques années plus tard, suicide qu’elle ne se pardonnera jamais et qui l’a conduite à embrasser la profession pour défendre des causes en utilisant ses propres codes, la Loi de Barbara
Dans la réalité de ces derniers jours et dans tous les médias, Nicolas Sarkozy du cabinet Claude & Sarkozy, un fils d’immigré hongrois devenu avocat à l’âge de 26 ans, en 1981, qui papillonne — à l’instar de son confrère François Mitterrand — au gré de ses intérêts, de droite à gauche voire aux extrêmes, pour gravir tous les échelons de la politique : maire de Neuilly-sur-Seine (1983), ministre du budget (1993), ministre de l’intérieur (2002 et 2005), ministre des finances (2004), président de l’UMP (2004) et, enfin, président de la République (2007), sans états d’âme malgré un passage à vide pendant le premier septennat de Jacques Chirac (1995-2002) pour avoir parié, en 1995, sur le mauvais cheval, Édouard Balladur. Une ascension fulgurante on ne sait encore exactement à quel prix et tous les indices de l'amorce d’une chute du sommet de l’iceberg de la sarkozie où trônent des valises par centaines en provenance de Taïwan, de Libye, des Bettencourt et d'autres généreux donateurs.
Olivier Landry est accusé du meurtre de l’amant de sa femme qu’il reconnaît avoir lourdement tabassé mais pas tué après les avoir trouvé dans les bras l’un de l’autre. Josiane Balasko en Me Barbara Malo hérite du dossier huit jours avant le début du procès devant une cour d’assises de province et c’est l’un des grands ténors pénalistes parisiens qui sera son adversaire, Me Solal. En moins de huit jours ou à peine cent minutes sur le petit écran, Me Malo va démêler les fils de l’affaire un à un et obtenir l’acquittement de son client après avoir démontré, de manière fort peu déontologique, la culpabilité du meurtrier que l’on ne soupçonnait pas.
À quelques jours d’intervalle, on apprend que Nicolas Sarkozy a été l’objet, pendant plusieurs mois, d’écoutes illégales de la part de son plus proche collaborateur, l’ancien journaliste d’extrême droite Patrick Buisson, et d’écoutes légales de la part de deux juges d’instruction enquêtant dans le cadre du financement de sa campagne présidentielle de 2007 par la Libye de Mouammar Kadhafi. Des écoutes illégales qui jettent une lumière fort crue sur ses méthodes de travail pendant qu’il a occupé les plus hautes fonctions et des écoutes légales à l’origine d’une nouvelle procédure pour « trafic d’influence » mettant en cause ses liens privilégiés avec un magistrat à la cour de cassation, Gilbert Azibert.
Balasko est excellente dans ce rôle de la mère meurtrie devenue avocate pour défendre la mémoire du fils perdu de sa prétendue propre et unique faute. Et s'agissant d'une fiction, on fermera les yeux sur ses écarts déontologiques qui ne donnent que plus de piment à cette série dont deux autres numéros sont d'ores et déjà annoncés par la production.
Sarkozy déçoit un peu mais pas tant que ça. La même indulgence semble prévaloir car on ne sait plus trop si l'on est dans la réalité ou la fiction. Moins d’un Français sur deux (44 %) pense en effet que ces révélations sur l’ancien chef de l’État redevenu avocat puissent avoir un impact négatif sur son image, selon un sondage