Grèce : Alexis Tsipras contraint de céder pour éviter le pire mais n’y croit pas

Élu sur la base d’un programme anti-austérité, anti-troïka et anti-diktat-de-Bruxelles, le jeune premier ministre grec de la gauche radicale Syriza, Alexis Tsipras, a été mis à genou et a dû accepter de manger son chapeau pour éviter un retour à la drachme et obtenir in extremis, à la dernière seconde de la onzième heure de dimanche dernier, un troisième plan d’aide pour son pays d’environ 85 milliards d’euros, sous réserve toutefois qu’il fasse adopter — dans les 72 heures — un premier train de réformes et moyennant la création d’un fonds où seront logés 50 milliards d’euros d’actifs publics grecs à privatiser qui servira de garantie pour les créanciers. Une humiliation sans précédent pour un pays souverain contraint d’hypothéquer tous ses bijoux de famille.
Ayant quitté la table des négociations quelques semaines plus tôt pour faire acter par ses partisans et soutiens que les propositions « bruxelloises » étaient iniques et inacceptables, M. Tsipras n’a toutefois guère profité du rejet massif par près de deux tiers de ses compatriotes des exigences de ses créanciers qui, eux, n’entendaient plus mettre la main à la poche sans davantage de garanties que les réformes à adopter seraient effectivement mises en œuvre nonobstant leur caractère « injuste » et « excessif ». Un politique novice et inexpérimenté qui pensait pouvoir obtenir toujours plus sans aucune contrepartie et après que ses prédécesseurs aient trafiqué les comptes du pays pour rejoindre le club.
Tel un gosse sorti de la cuisse de Jupiter qui se croit le plus « beau » sur terre et« unique » au monde, le dieu Tsipras a fini par se réveiller et la pilule n’a été que plus amère mais il l’a néanmoins avalée, gentiment, intégralement, sans broncher et en n’omettant pas d’en vanter les nombreux mérites tout en déclarant qu’il n’y « croit pas » car le plus dur reste effectivement à venir avec des réformes législatives qu’il doit faire adopter sans délai en courtisant l’opposition qui avait dit « ναί » (oui) au référendum auquel il avait lui-même appelé à voter non — sa majorité de « όχι » (non) se désintégrant à présent au fur et à mesure que le détail et la dureté des réformes imposées par les créanciers sont connues — et ensuite les mettre en œuvre par des réformes administratives sérieuses pour qu’elles puissent produire les effets financiers bénéfiques escomptés. Une tragédie grecque dont la fréquence a fini par fatiguer bon nombre de créanciers.

Sur place, à Athènes, la semaine dernière, tout comme cette semaine-ci, c’est la lassitude qui domine et les Athéniens ne semblent aspirer qu’à tourner la page après avoir réalisé l’incapacité de la gauche radicale de donner vie à une utopie aussi irréaliste qu’irréalisable. Quelques poignées de fonctionnaires irréductibles résistent et manifestaient ce matin dans les rues d’Athènes mais la majorité des Grecs veulent y croire et s’accrochent à cet accord dit de Bruxelles qui devrait leur permettre de rester dans la zone euro et voir la réouverture prochaine des banques et avec elle, dans les prochaines semaines, un nouveau départ qui sera peut-être, cette fois-ci, le bon !

Côté touristes, on ne vit — du moins, pas encore — ni chaos ni pénurie avec tous les grands établissements et la plupart des petits qui continuent d’accepter normalement Visa, MasterCard et autres AmericanExpress sans la moindre difficulté, seul Daphne’s Restaurant (4 Lisikratous, Athènes) a exigé du cash compte tenu des « circonstances ». À quelques encablures de là, Scholarhio Ouzerie Kouklis (14 Tripodon, Plaka, Athènes), un restaurant familial traditionnel très avenant qui accepte encore toutes les cartes de crédit et qui offre un rapport qualité/prix exceptionnel : 28 euros pour deux personnes pour 5 plats à choisir parmi 18 spécialités grecques avec boisson, eau et dessert inclus. Compter 3 euros de plus pour 2 cafés. DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL À ATHÈNES (GRÈCE).