Homosexualité : Quarante ans après sa dépénalisation, des discriminations persistent

Il y a quarante ans, le 4 août 1982, la France abrogeait les dispositions du code pénal réprimant les relations sexuelles entre adultes de même sexe. Si depuis lors, la loi et le droit positif se veulent de plus en plus « protecteurs » envers l’ensemble de la communauté Lgbti, la persistance et l’ampleur des discriminations dont elles continuent d’être « victimes » demeurent, selon la Défenseure des droits Claire Hédon, « alarmantes » et à l’occasion de l’anniversaire de ce vote historique, elle a entendu rappeler « l’impératif d’effectivité de l’ensemble de leurs droits ».
Des discriminations importantes à toutes les étapes de la vie
Selon une étude de l’Ifop de 2019
Depuis sa création, et à la suite des actions de la Halde avant lui, le Défenseur des droits s’est en effet mobilisé en faveur des droits des personnes Lgbti. L’institution a publié, en 2012, la première enquête mettant en lumière les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans l’emploi dans le cadre de son baromètre annuel avec l’Oit. Elle a aussi produit de nombreuses recommandations afin d’améliorer l’égalité et les droits des personnes Lgbti et précise avoir obtenu notamment (i) l’adaptation des formulaires administratifs aux couples de même sexe, (ii) la prise en compte des années de pacs dans le calcul des pensions de réversion, (iii) l’effectivité du congé de paternité et d’accueil de l’enfant, (iv) le versement de droits aux enfants nés à l’étranger de GPA, (v) l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, (vi) l’ouverture du don du sang pour les hommes homosexuels, (vii) la reconnaissance de la filiation des deux parents pour les enfants issus de PMA ou nés à l’étranger de GPA au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant, (viii) la fin de l’exigence de preuve de l’irréversibilité de la transformation de l’apparence, c’est-à-dire la stérilité des personnes transgenre dans leur procédure de changement d’état civil, et (ix) l’acceptation dans l’éducation nationale des demandes de modification de prénom en amont de tout changement d’état civil.
L’effectivité des droits des personnes Lgbti difficile à mettre en œuvre
Harcèlement dans l’emploi, refus de location de logement, défaut de prise en compte du mariage pour l’ouverture d’un compte joint, refus de prise en charge du parcours de transition,… Telles sont les situations pour lesquelles la Défenseure des droits dit encore être sollicitée en 2022 même si le critère de l’orientation sexuelle n’est présent que dans 2 % des réclamations qui lui sont soumises.
Le taux de non-recours reste très élevé et lorsque recours il y a, le contentieux s’avère extrêmement difficile et avec des effets « dissuasifs insuffisants », explique Claire Hédon qui plaide pour une meilleure information des victimes quant à leurs droits et des sanctions plus dissuasives, rappelant que l’institution y contribue au travers de sa plateforme 3928 de lutte contre les discriminations, créée en 2021.
La Défenseure des droits dit regretter que la communauté éducative soit encore trop peu sensibilisée à ces sujets, que les cours d’éducation à la sexualité prévus par la loi ne soient toujours pas effectifs et qu’ils se réduisent trop souvent à une information sur la contraception ou à la prévention des maladies sexuellement transmissibles alors que la sensibilisation et la formation constituent « des outils essentiels pour identifier en amont les situations ou les processus qui mènent à la discrimination, afin de les corriger ».
« Je redemande avec force, conclut Claire Hédon, la mise en place de campagnes de prévention et de lutte contre les LGBTphobies notamment à destination des élèves, la formation des personnels de l’Éducation nationale et la mise en place d’un cadre de référence en matière d’éducation à la sexualité. On ne peut se satisfaire, 40 ans après une telle évolution législative, d’une effectivité partielle des droits, elle doit être totale et inamovible ».