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Impôt sur le revenu : Le prélèvement à la source en 2018

Par Alfredo Allegra | LEXTIMES.FR |
Le prélèvement à la source entrerait en vigueur le 1er janvier 2018. Le prélèvement à la source entrerait en vigueur le 1er janvier 2018.

À neuf mois de l'élection présidentielle, le gouvernement confirme son intention de mettre en œuvre le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu à compter du 1er janvier 2018 malgré le faible soutien de l'opposition qui risque de le remettre en cause si elle reprend les manettes du pouvoir en mai 2017.

À l'instar de ce qui existe déjà dans la plupart des autres pays sur les cinq continents en matière de salaires — en Europe, la seule autre et unique exception est la Suisse —, le prélèvement de l'impôt sur le revenu directement à la source supprimera le décalage d'un an existant actuellement entre la perception des revenus en année n et leur imposition en année n+1, ce qui permettra aux cigales de ne pas dépenser ce qu'elles devraient économiser pour payer l'impôt l'année suivante.

Quant aux fourmis, elles n'y perdront que très faiblement à la marge avec des taux d'intérêt qui sont durablement proches de zéro voire négatifs. Les grands gagnants, hormis tous les EBP et autres Sage qui vont indubitablement enregistrer un très bonne année 2017, seront les collecteurs du prélèvement qui bénéficieront d'un effet positif sur leur trésorerie, ils ne devront en effet reverser l'impôt à l'administration fiscale que 8, 15 ou 90 jours — selon leur taille — après l'avoir prélevé. Le grand perdant est, bien sûr, l'État avec une année d'impôt en moins dite « année blanche » et des réductions/crédits d'impôt doublés pour 2018.

Ce projet de réforme est toutefois plus novateur et plus ambitieux que ce qui s'est fait ailleurs jusqu'à présent dans la mesure où il concerne non seulement les salaires mais également tous les revenus de remplacement (pensions de retraite, allocations de chômage, indemnités journalières,...) ainsi que les revenus des professions indépendantes (commerçants, artisans, libéraux, agriculteurs,...) et les revenus fonciers, soit la quasi-totalité de l'ensemble des revenus encaissés par plus de 98 % des foyers fiscaux, selon le communiqué du ministre des finances et des comptes publics Michel Sapin et du secrétaire d'État chargé du budget Christian Eckert.

Le taux de prélèvement de chaque contribuable sera calculé et communiqué par l'administration fiscale au collecteur et il y aura, pour les salariés, « simplement » une ligne supplémentaire sur le bulletin de salaire qui en compte déjà pas mal. Sur demande de l'intéressé, ce taux pourra être adapté à chaque situation particulière, être différent pour chacun des conjoints ou il sera même possible d'opter pour un taux « neutre » et le faire modifier très rapidement en cas de survenance d'un événement quelconque (mariage, divorce, naissance d'un enfant...) ou d'une baisse de revenus passagère ou durable (chômage, maladie, retraite,...).

Pour illustrer la réforme projetée, le gouvernement prend l'exemple de Pierre et Martine qui, tous deux âgés de 59 ans, disposent d'un revenu mensuel net cumulé de 5 200 euros et font valoir leurs droits à la retraite, en même temps, à compter du 1er octobre 2018 et percevront alors seulement 3 600 euros par mois.

Cas-type de prélèvement à la source

Sans la réforme, selon cette infographie, Pierre et Martine paieront en 2018 et jusqu'au mois d'août 2019, s'ils sont mensualisés, un impôt de 556 euros par mois sur 10 mois alors qu'avec la réforme, ils seront prélevés à la source au taux de 8,9 %, soit 463 euros par mois sur 12 mois et dès octobre 2018, leur mensualité d'impôt ne sera plus que de 321 euros.

Chicanons pas sur cet exemple tiré par les cheveux d'un couple d'exactement le même âge dont les deux conjoints font valoir leurs droits à la retraite exactement au même moment mais disons quand même qu'il est abusif pour ne pas dire faux. Il est abusif en effet de faire croire que sans cette réforme, Pierre et Martine seraient obligés de régler 556 euros par mois jusqu'au mois d'août 2019 puisqu'en pareille hypothèse, en l'absence de réforme, il serait tout-à-fait possible pour nos deux jeunes retraités, à compter de la mensualité de janvier 2019, de réduire leur versement de 556 euros à 385 euros par mois, étant précisé que 556 euros sur 10 mois et 463 euros sur 12 mois ou 385 euros sur 10 mois et 321 sur 12 mois, c'est exactement blanc bonnet et bonnet blanc.

Cela dit, si la réforme aboutit, en 2017, on paiera donc l'impôt sur les revenus de 2016 et en 2018, on sera directement prélevé à la source dès le mois de janvier sur tous les revenus quels qu'ils soient. Mais les revenus de 2017 ne seront pas imposables bien qu'il faudra quand même faire une déclaration de revenus, comme d'habitude, au printemps 2018 et ils ne seront effectivement pas imposables sous la réserve qu'ils n'aient pas été « artificiellement » majorés ou « sur-optimisés ». Tout excès est donc à proscrire mais les petites hausses en 2017 suivies de petites baisses en 2018 devraient être légion et plus elles seront contenues dans des proportions raisonnables, plus elles seront indécelables.

Si tous les revenus encaissés en 2017 ne subiront aucun impôt et que seuls les revenus exceptionnels ou les plus-values seront taxés, tous les crédits et réductions d'impôt concernant des dépenses (dons aux associations, salarié à domicile,...) effectuées en 2017 seront restitués au mois d'août 2018 et l'ardoise pourrait se révéler plus lourde que le gouvernement ne le prévoit actuellement.

Calendrier du prélèvement à la source

Mais quid si l'entrepise qui vous prélève l'impôt à la source ne le reverse pas à l'administration fiscale pour cause de malhonnêteté ou parce qu'elle se retrouve en difficultés et ensuite en redressement ou liquidation judiciaire ? Sollicité ce matin par LexTimes.fr, le cabinet de Michel Sapin était aux abonnés absents. Celui de Christian Eckert, en revanche, a été très réactif. « Il est bien normal que des questions se posent et que les attentes soient fortes mais tous les détails de la réforme viendront en temps voulu », a fait répondre M. Eckert qui, poussé dans ses derniers retranchements, a précisé que « tout sera détaillé dans le PLF [projet de loi de finances, ndlr] à l'automne. Mais le principe est que les salariés ne seront pas double-imposés en cas de défaillance de leur entreprise ».

 

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