Ivresse publique : Le placement en cellule de dégrisement est constitutionnel

Le placement en cellule de dégrisement d'une personne en état d'ivresse publique jusqu'à ce qu'elle ait retrouvé la maîtrise de ses sens est constitutionnel mais si après dégrisement, la personne est placée en garde à vue, la durée du placement en chambre de sûreté doit être prise en compte dans la durée de garde, a jugé aujourd'hui le Conseil constitutionnel en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Il était soutenu qu'en permettant que les personnes trouvées sur la voie publique en état d'ivresse puissent être privées de leur liberté pour une durée indéterminée par une mesure de police non soumise au contrôle de l'autorité judiciaire et en fondant l'appréciation de l'ivresse sur la seule évaluation subjective d'un agent de la police ou de la gendarmerie nationales, l'article L. 3341-1 du code de la santé publique selon lequel :
« Une personne trouvée en état d'ivresse dans les lieux publics est, par mesure de police, conduite à ses frais dans le local de police ou de gendarmerie le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu'à ce qu'elle ait recouvré la raison./ Lorsqu'il n'est pas nécessaire de procéder à l'audition de la personne mentionnée au premier alinéa immédiatement après qu'elle a recouvré la raison, elle peut, par dérogation au même premier alinéa, être placée par un officier ou un agent de police judiciaire sous la responsabilité d'une personne qui se porte garante d'elle »,
méconnaissait la protection constitutionnelle de la liberté individuelle.
Relevant liminairement que « la conduite dans un local de police ou de gendarmerie d'une personne trouvée en état d'ivresse sur la voie publique et le placement de celle-ci dans ce local ou en chambre de sûreté jusqu'à ce qu'elle ait recouvré la raison » sont des mesures relevant de la police administrative dont l'objet est de prévenir les atteintes à l'ordre public et de protéger la personne elle-même, le Conseil constitutionnel
Il ressort des termes de la même disposition, poursuit le Conseil, que la privation de liberté ne peut se poursuivre après que la personne a recouvré la raison et la condition ainsi posée par le législateur a « pour objet et pour effet de limiter cette privation de liberté à quelques heures au maximum ». La même disposition autorise, en outre, un officier ou un agent de police judiciaire, « s'il apparaît qu'il ne sera pas nécessaire de procéder à l'audition de la personne après qu'elle aura recouvré la raison, à ne pas la placer en chambre de sûreté et à la confier à une tierce personne qui se porte garante d'elle ». Ainsi prévu, organisé et limité par la loi, le placement en chambre de sûreté n'est pas une détention arbitraire, en concluent les Sages de la rue de Montpensier pour qui, le cas échéant, une éventuelle faute commise par les agents de la police ou de la gendarmerie nationales dans l'exercice de leurs attributions « engage la responsabilité de la puissance publique devant la juridiction compétente ».
Mais, il y a néanmoins une petite réserve émise par le Conseil en ce que lorsque la personne est placée en garde à vue après son séjour en cellule de dégrisement, « la protection constitutionnelle de la liberté individuelle par l'autorité judiciaire exige que la durée du placement en chambre de sûreté, qui doit être consignée dans tous les cas par les agents de la police ou de la gendarmerie nationales, soit prise en compte dans la durée de la garde à vue ».