Justice confinée : Les propos insultants et inexacts de trois avocats parisiens

Le service public de la justice ne s'est pas arrêté
Le service public de la justice ne s'est pas arrêté.

La première présidente Chantal Arens et le procureur général François Molins près la Cour de cassation ont cru utile devoir répliquer, par voie de communiqué de presse, à une tribune, aussi « insultante » qu’ « inexacte », signée par trois avocats parisiens et intitulée « La justice a disparu et les juges ont déserté ».

Dans les circonstances exceptionnelles d’état d’urgence sanitaire que nous connaissons, écrivent les deux plus hauts magistrats judiciaires de France, « le service public de la justice ne s’est pas arrêté et les cours et tribunaux, grâce au dévouement des magistrats et des fonctionnaires, continuent d’assurer les missions essentielles de la justice en temps de crise et de protéger les libertés individuelles ».

La Cour de cassation, elle-même, expliquent Mme Arens et M. Molins, a maintenu « les audiences traitant de pourvois urgents touchant aux libertés individuelles en associant pleinement les avocats aux Conseils à la détermination des missions à maintenir pendant la période de confinement » et disent regretter que des auxiliaires de justice cherchent à « décrédibiliser notre institution dans une période qui exige, au contraire, qu’autour des valeurs qui nous sont communes […] nous mobilisions nos énergies dans l'exercice optimal de nos missions ».

La tribune litigieuse publiée hier dans le coin « Invités » du site mediapart.fr est signée par Dominique Tricaud, Matteo Bonaglia et Anis Haribi. Le premier est un avocat que l’on peut qualifier de « chevronné », ancien secrétaire de la conférence (1985) et ancien membre du conseil (2005-2007), qui s’est associé, il y a quelques mois, avec deux jeunes avocaillons (novembre 2016 et novembre 2015) au sein d’une « association » dénommée Tricaud Avocats.

Les trois avocats estiment, en introduction de leur diatribe, que l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période et sa circulaire d’application sont « la conséquence inéluctable de la désertion des juges » et après quelques exemples bien choisis (prévenus présumés innocents, conflits de voisinage et familiaux, employeurs indélicats, vendeuses [sic !], éboueurs et ouvriers allant travailler la peur au ventre), relevant que « les magistrats ne nous ont jamais habitué à un courage excessif dans les périodes noires », en viennent à « regretter » qu’ils se « terrent » alors qu’ils devraient « intervenir dans l’urgence pour sauver des familles que le confinement déchire, protéger des enfants battus » pour nous délivrer de cette société qui « vacille sous la peur et [qui] rêve de dictature ».

 Le plus « étonnant », poursuivent les trois acolytes, est que cette « disparition de la justice n’a pas encore provoqué de guerre civile ou de retour à la loi du Talion […] la société confinée s’accommode de la disparition de la justice ».

Avec une pointe d’humeur et sans agressivité, Benjamin Marty, un juge qui « n’y a pas reconnu [dans cette tribune] le quotidien actuel des juridictions », a créé un blog sur le site mediapart.fr pour leur répondre et détailler tout ce que la justice et les magistrats font en cette période de confinement.