Justice : En cessation de paiement dès la fin du premier semestre de chaque année

Ministère de la justice, place Vendôme.
Ministère de la justice, place Vendôme.

Cinq syndicats dénoncent la pénurie budgétaire dans laquelle la justice est maintenue depuis des années et l'état de cessation des paiements dans lequel elle se trouve dès la fin du premier semestre de chaque année.

Il s'agit de l'association nationale des experts psychiatres (Anpej), de l'association de politique criminelle appliquée et de réinsertion sociale (Apcars), de l'association experts et traducteurs interprètes judiciaires (Expertij), de l'Unsa (union nationale des syndicats autonomes) services judiciaires et de l'union syndicale des magistrats (Usm) qui constatent, sur le terrain, que les services judiciaires « ne peuvent plus faire face au règlement des frais de justice »

Sur 45 pays membres du Conseil de l'Europe, le budget que la France consacré à la justice ne pointe qu'à la 37e place, selon la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (Cepej), et ne représente que 0,197 % de son produit intérieur brut (PIB) contre une moyenne européenne de 0,333 %, soit 40,84 % de moins que la moyenne qui n'est pourtant guère très élevée compte tenu de l'adhésion de nombreux pays de l'Est au cours des deux dernières décennies. 

L'actuel ministre de la justice, Jean-Jacques Urvoas, avait d'ailleurs lui-même déclaré début avril, rappellent les cinq associations, que « la justice française est "à bout de souffle", l'institution judiciaire est "en état d'urgence absolue" et sa sauvegarde n'est assurée que par le seul "dévouement admirable de tous ceux qui [la] servent" » mais le problème est que la France a deux fois moins de juges, quatre fois moins de procureurs et deux fois moins de greffiers pour 100 000 habitants que la moyenne européenne.

Parmi les récriminations figurent « les déplorables conditions d'accueil en juridiction, les difficiles conditions d'exercice pour l'ensemble des personnes qui servent la justice, les retards systématiques de paiement, l'absence de revalorisation des actes (expertises, enquêtes sociales,...) indispensables au bon fonctionnement de la justice et rendus obligatoires par le législateur » et le communiqué souligne « le découragement de tou[s] ceux qui contribuent au fonctionnement quotidien de la justice » pour réclamer les « moyens nécessaires à son [bon] fonctionnement » consistant en une « augmentation substantielle du budget des services dès 2017 et l'adoption d'une loi de programmation pluriannuelle afin de hisser la France au niveau des grandes démocraties européennes ».

Dans le détail, les experts psychiatres réclamaient la réintégration immédiate dans le statut collaborateur occasionnel du service public (Cosp) et l'ont obtenueDécret n° 2016-744 du 2 juin 2016 modifiant le décret n° 2015-1869 du 30 décembre 2015 relatif à l'affiliation au régime général de sécurité sociale des personnes participant de façon occasionnelle à des missions de service public, J.O., n° 130, 5 juin 2016, n° 23. tout aussitôt mais continuent de réclamer une revalorisation du tarif des expertises psychiatriques pour tenir compte du « travail intellectuel » ainsi qu'une revalorisation substantielle du tarif des dépositions devant les cours d'assises et la possibilité d'un dépassement des honoraires tarifés pour « les expertises complexes nécessitant plusieurs heures d'examen du dossier et de rédaction du rapport et plusieurs déplacements pour des examens ».

L'Apcars qui intervient sept jours sur sept pour, dans des conditions parfois difficiles, des enquêtes sociales rapides, des enquêtes de personnalité, des contrôles judiciaires socio-éducatifs ou des médiations pénales, se plaint d'une ardoise de 1,7 million euros à fin avril 2016 et d'une absence de revalorisation de la tarification de l'enquête sociale depuis douze ans alors que les charges salariales ne cessent d'augmenter.

Les experts traducteurs interprètes dénoncent également des retards de paiement qui obligent certains d'entre eux à démissionner ou à refuser de travailler dans de telles conditions et les juridictions ont alors recours à « des personnes qui ne sont pas qualifiées mais disponibles 24 heures sur 24 » et qui ne paient ni impôts ni charges sociales.