Justice : Jean-Jacques Urvoas candidat à sa propre succession

De manière tout-à-fait inattendue et inhabituelle, le ministre de la justice Jean-Jacques Urvoas a publié hier aux éditions Dalloz une Lettre du garde des Sceaux à un futur ministre de la Justice de 57 pages, sobrement intitulée « Partageons une ambition pour la justice » où il formule moult propositions dont certaines fort consensuelles.
Une lettre insolite qui semble être adressée à lui-même pour mettre en avant et en valeur le « dur labeur » et le « magnifique résultat » de ses quinze mois passés place Vendôme où il a « inlassablement sarclé, obstinément biné, opiniâtrement semé, en cherchant à renforcer le service public de la justice » et « certaines pousses apparaissent déjà […] » même si « des chantiers majeurs restent encore à mener » pour lesquels « le temps [lui] a fait défaut ».
Le futur garde des sceaux devra agir, conclut le Dr. Urvoas à l’adresse de Mr. Jean-Jacques dans sa brève introduction, « sans désemparer, avec l’élan nécessaire que permet un début de quinquennat » et pour cela, il lui soumet « dix chantiers, tous tournés vers une unique ambition : réparer le présent et préparer le futur ».
Dans ces dix chantiers qu’il s’assigne, de « la poursuite du rapprochement de la justice du citoyen [par une meilleure] accessibilité, simplicité, efficacité, rapidité » et « mettre la force de la technologie au service de tous » à « l’amplification de la politique de recrutements massifs » et « le droit comme levier de croissance » en passant par « une révision constitutionnelle au service de la nation » et une « Europe de la justice », cette « candidature spontanée », indubitablement fort bien motivée, de l’actuel garde des sceaux à sa propre succession à l’éventuel futur président de la République Emmanuel Macron met en avant le bilan de l’un et la vision de l’autre, une manière de s’assurer les bonnes grâces du roi si le pire que d’aucuns redoutent est fort heureusement évité, sans se mettre toutefois ouvertement en marche derrière le candidat qui porte ses convictions.