Justice : Les juges consulaires se remettent au travail

Les juges des tribunaux de commerce ont annoncé jeudi la suspension de leur mouvement de renvoi systématique des audiences, après avoir constaté que l'essentiel des mesures les concernant ne figureraient pas dans la loi Macron, mais dans un texte présenté par la Chancellerie début 2015.
Durant les quatre jours qu'a duré le mouvement, plusieurs milliers d'affaires ont été renvoyées, a indiqué Jean-Luc Adda, président du tribunal de commerce d'Alençon (Orne) et membre du conseil d'administration de la Conférence générale des juges consulaires de France, lors d'un point de presse à Paris. Le président de la Conférence, Yves Lelièvre, a précisé qu'il s'agissait d'une suspension et non d'un arrêt. « Tout n'est pas réglé, loin de là », a-t-il expliqué.
Un seul point du projet de loi Macron présenté mercredi concerne les tribunaux de commerce : la création de juridictions « spécialisées », « pour les plus grandes entreprises en difficulté ». La Conférence n'est pas hostile au principe de délocalisation de certains dossiers importants, mais s'inquiète des seuils qui déclencheront le transfert d'une affaire vers une autre juridiction.
Les juges consulaires craignent qu'ils soient fixés à un niveau trop bas, mettant en cause l'existence même des petits tribunaux, a expliqué M. Adda. « On est invité à faire des propositions », s'est félicité Jacques Picard, président du tribunal de commerce de Toulouse et également administrateur de la Conférence.
Hormis la spécialisation, la Conférence s'est réjouie du fait que, comme l'avait indiqué la garde des sceaux, Christiane Taubira, l'essentiel de la réforme des tribunaux de commerce soit comprise dans son texte sur la « justice du XXIe siècle », qui devrait être présenté au premier trimestre 2015. Cette réforme devrait prévoir de nouvelles obligations en matière de formation et de déontologie pour les juges consulaires, la définition d'un véritable statut et l'introduction de juges consulaires au niveau des cours d'appel, aussi appelé échevinage. Si elle est favorable aux deux premiers volets, la Conférence reste en revanche radicalement opposée à l'échevinage en cour d'appel.
« C'est mettre le doigt dans l'engrenage » qui pourrait amener, in fine, l'introduction de magistrats professionnels dans les tribunaux de commerce, a estimé M. Lelièvre, assurant que les juges consulaires reprendraient leur mouvement si ce point était maintenu dans le texte présenté en 2015.
Par ailleurs, sollicité par l'AFP, le Conseil national des administrateurs et mandataires judiciaires a indiqué qu'il suspendait son mouvement à compter de vendredi soir. Ces professions étaient en grève depuis le vendredi 28 novembre au soir, refusant d'être désignées dans des procédures devant les tribunaux de commerce. Le projet de loi Macron prévoit d'intégrer les mandataires judiciaires au sein d'une nouvelle profession de commissaire de justice, aux côtés des huissiers et des commissaires-priseurs, bien que le Conseil d'État ait suggéré de les laisser en dehors de ce nouvel ensemble.