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Justice : Projets des décrets "Procédure civile" et "Divorce"

Par Alfredo Allegra | LEXTIMES.FR |
Ministère de la justice Ministère de la justice

Le Conseil national des barreaux (CNB) a adopté samedi une motion demandant « un report d’au moins six mois » des décrets « Procédure civile » et « Divorce », qu’il dit avoir reçu la veille à 20 heures et qui sont actuellement sur le bureau du Conseil d'Etat et devraient normalement entrer en vigueur au 1er janvier 2020.

S'agissant d'une réforme de la justice « d'une telle ampleur », l’institution représentative des quelques 66 000 avocats de France dit déplorer, dans un communiqué, « l'absence de concertation depuis le mois d'août 2019 sur les décrets d'application de ladite loi en procédure civile », « une communication très tardive à la profession (15 novembre, 20h) et aux juridictions, de textes encore provisoires, puisque soumis au Conseil d'Etat, ce qui constitue un mépris de la profession, de la magistrature et du justiciable » et « l'inflexibilité de la volonté des pouvoirs publics à voir ces textes entrer en vigueur le 1er janvier 2020 », empêchant les magistrats et les greffiers de « mettre en œuvre avec la profession, les conditions nécessaires pour faire face à cette réforme majeure, et de pouvoir assurer l'information et la formation y afférentes ».

Sur le fond, le CNB est plus particulièrement opposé à « l'exécution provisoire de droit des décisions de première instance » et, sur la forme, « exige » un report d’au moins six mois de la date d'entrée en vigueur des décrets à venir, en raison « de risques majeurs de sinistralité, d'autant que l'adaptation de la communication électronique ne sera pas effective à cette date ».

Le syndicat des avocats de France (SAF) rappelle, quant à lui, qu’il avait exprimé ses « plus grandes réserves » sur la rédaction « confuse de la loi ainsi que ses finalités exclusives d’économies et de régulation des flux » et n’est guère plus tendre avec ces décrets « élaborés hors de toute concertation » et confirmant la « volonté d’une justice mécanique et désincarnée ». Pour le SAF, le mode de saisine quasi unique, l’exécution provisoire de droit et le juge unique sont autant de mesures qui portent une « grave atteinte à la qualité de la production judiciaire », outre le fait que le système ne pourra fonctionner dans un délai aussi court « sans nouveau logiciel métier, sans mise en réseau des juridictions et sans une collaboration réfléchie entre avocats, magistrats et greffiers ».

Pas de quoi lancer de hauts cris toutefois, le projet de décret réformant la procédure civile prévoit en effet d’unifier les modes de saisine du tribunal judiciaire — issu de la fusion des tribunaux d’instance et de grande instance —, du tribunal de commerce et du tribunal paritaire des baux ruraux autour de l’assignation et de la requête remise au greffe ou formée par courriel — exit donc la déclaration orale au greffe — laquelle restera néanmoins possible en cas de procédure orale pour les demandes inférieures à 5 000 euros. On devrait, a priori, plutôt se réjouir que l’on tende vers un mode de saisine unique, qu’il s’agisse de la juridiction commerciale ou civile.

Quant à l’exécution provisoire, le texte en gestation en consacre, certes, le principe mais le juge peut « écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou en partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire » et elle reste interdite dans certaines matières et est facultative dans d’autres.

Le texte, en revanche, constitue une réelle avancée en matière de règlement amiable des différends qu’il convient de souligner, en relevant l’avant-dernier alinéa de l’actuel article 56 du code de procédure civile, selon lequel « sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, l'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige », au rang d’obligation passible de nullité. La nouvelle rédaction en serait : « L’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes de justice et celles énoncées à l’article 54 : […] 5° lorsqu’elle est soumise à l’obligation d’une tentative préalable de conciliation, médiation ou procédure participative, l’assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige ».

 

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