Justice : Un avocat sorti manu militari d’une salle d’audience

Me Paul Sollacaro. Photo DR.
Me Paul Sollacaro. Photo DR.

Le président du Conseil national des barreaux (CNB) Jérôme Gavaudan a annoncé vendredi, dans un communiqué, avoir saisi le garde des sceaux Éric Dupond-Moretti concernant l’incident survenu hier matin au tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence entre le président de chambre Marc Rivet et le jeune avocat niçois Paul Sollacaro, le fils de l’ancien bâtonnier d’Ajaccio assassiné en 2012.

À l’origine de l’incident, une demande de disjonction ou de renvoi motivée par la covid 19 dont était atteint l’un des prévenus défendu par Me Sollacaro dans le cadre d’un procès qui devait durer deux jours et mettant en cause dix prévenus poursuivis pour trafic de drogue dans les Bouches-du-Rhône et encourant une peine d’emprisonnement de vingt ans.

Et non seulement le président Rivet a refusé la demande de disjonction ou de renvoi — appuyée aussi bien par le ministère public que par les avocats de toutes les autres parties en cause —, sans concertation avec ses deux collègues, mais il a également refusé que le prévenu malade pût assister à son procès et c’est ce qui explique des échanges assez vifs de part et d’autre qui se sont terminés par une sortie manu militari de l’avocat par huit policiers, au grand dam de tous ses confrères présents dans la salle d’audience.

C’est en ouverture de l’assemblée générale du CNB qui se tenait ce matin que le président de l’institution représentative des quelque 70 000 avocats de France a ainsi raconté qu’hier, à Aix-en-Provence, un « de [ses] confrères a été sorti manu militari d’une salle d’audience par les forces de l’ordre et d’autres avocats présents bousculés ».

Fallait-il juger un homme hors de sa présence pour respecter les consignes sanitaires ou le faire venir conformément aux droits de la défense et ce faisant faire courir un risque sanitaire majeur, se demande Me Gavaudan pour qui ni l’une ni l’autre de ces deux alternatives n’est satisfaisante et condamnant implicitement si ce n’est explicitement le refus opposé à la demande de renvoi ou de disjonction et qui lui fait dire que, dans notre pays, en 2021, on ne peut imposer pareils « choix indignes » qui sont contraires à l’image de la justice, de l’audience et des droits de la défense.

Pour le président du CNB, ce qui s’est passé à Aix est « inadmissible », il s’agit d’une « caricature de justice » qui doit être dénoncée avec « vigueur » et pour cela, il sait qu’il peut compter sur l’ancien avocat devenu ministre de la justice qui n’a pas qu’une dent mais tout un dentier contre les agissements de certains magistrats.