Liberté d'expression : Avi Bitton poursuivi pour avoir critiqué Jeannette Bougrab

Jeannette Bougrab, lors de sa prestation de serment, 19 déc. 2012.

L'autorité de poursuite du barreau de Paris a lancé, selon plusieurs sources concordantes, une procédure disciplinaire contre un MCO (membre du conseil de l'ordre) qui avait accusé Jeannette Bougrab, une ancienne secrétaire d'État devenue avocate au mois de décembre dernier, de servir de « mannequin de vitrine » au cabinet américain Mayer Brown.

Avi Bitton, 36 ans, membre du conseil de l'ordre de Paris (2010-2015) et du conseil national des barreaux (2012-2014), président du Manifeste des avocats collaborateurs, s'était indigné, dans un billet« Exclusif — Jeannette Bougrab, la token woman de Mayer Brown ? », Avi Bitton, 21 janv. 2013,notremanifeste.com.publié sur le site du syndicat qu'il préside, que le cabinet d'avocats américain Mayer Brown présente sur son site Mme Bougrab comme « partner » (associée, dirait-on en français) du cabinet alors qu'on ne la retrouve sur la fiche du cabinet dans l'annuaire du barreau de Paris que parmi les 64 « collaborateurs ».

Fiche du cabinet Mayer Brown, annuaire du barreau de Paris, 15 mars 2013.

 Dans son billet, Avi Bitton accusait l'ancienne présidente de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) de se laisser utiliser par le bureau parisien du cabinet américain comme une « femme alibi d'une diversité fictionnelle », accusant par ailleurs cette ancienne secrétaire d'État de Nicolas Sarkozy d'avoir menti sur son salaire. 

Estimant que Me Bitton avait enfreint plusieurs « principes essentiels » de la profession, dont ceux de confraternité, de délicatesse et de courtoisie, Mme Bougrab et son confrère employeur Mayer Brown seraient à l'origine d'une réclamation adressée à l'Ordre qui aurait abouti, le 25 février, à cette poursuite disciplinaire contre un membre du conseil de l'ordre, ce qui est relativement rare.

Le précédent connu remonte à Me Caroline Mecary sanctionnée par un avertissement par le conseil de discipline pour « avoir, en 2010, envoyé des messages électroniques à ses confrères mettant en cause deux candidats au bâtonnat » et qui avait ensuite été relaxée par la cour d'appel de Paris. Deux ans plus tôt, une autre membre du conseil de l'ordre, Martine Malinbaum, avait eu à s'expliquer devant ses pairs pour avoir publié les lettres de son « client-amant », Jacques Mesrine.

Cette procédure disciplinaire examinera également trois autres réclamations déposées contre Me Bitton. « C'est un procès politique car il n'y a aucune plainte d'un client et aucun fait relatif à un dossier », a déclaré Me Bitton à l'Agence France-Presse, ajoutant que les griefs «  sont uniquement liés à [ses] activités syndicales. On [le] poursuit pour [le] faire taire », affirme-t-il.