Mali : Al Hassan remis à la CPI pour des accusations de crimes contre l’humanité et crimes de guerre

Bamako a remis hier Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud à la Cour pénale internationale (CPI) et est arrivé au quartier pénitentiaire de la Cour aux Pays-Bas. M. Al Hassan est suspecté, selon un mandat d’arrêt délivré par la Chambre préliminaire I de la CPI le 27 mars 2018, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis en 2012 et 2013 à Tombouctou, au Mali.
La Chambre est convaincue qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’un conflit armé à caractère non-international a débuté en janvier 2012, et était toujours en cours au Mali pendant toute la période des faits allégués. Pendant cette période, courant du début avril 2012 jusqu’au 17 janvier 2013, la ville de Tombouctou aurait été sous la domination des groupes armés Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) et Ansar Eddine, mouvement principalement touarègue associé à AQMI. Al Hassan a joué « un rôle de premier plan dans la commission des crimes et la persécution religieuse et sexiste infligée par ces groupes armés à la population civile de Tombouctou ».
Selon le mandat d’arrêt, M. Al Hassan, de nationalité malienne, né le 19 septembre 1977, dans la communauté d’Hangabera située à environ 10 km au nord de Goundam dans la région de Tombouctou, au Mali, et membre de la tribu touarègue/tamasheq des Kel Ansar, aurait été membre d’Ansar Eddine et aurait été commissaire de facto de la Police islamique. Il aurait également été associé au travail du Tribunal islamique à Tombouctou et aurait participé à l'exécution de ses décisions. Al Hassan aurait pris part à la destruction des mausolées des saints musulmans à Tombouctou grâce à l’utilisation des hommes de la Police islamique sur le terrain. Il aurait aussi participé à la politique de mariages forcés dont des tombouctiennes ont été victimes, qui ont donné lieu à des viols répétés et à la réduction de femmes et de jeunes filles à l’état d’esclaves sexuelles.
La Chambre a conclu que les preuves présentées par le Procureur donnent des motifs raisonnables de croire que M. Al Hassan serait pénalement responsable au sens des articles 25-3-a ou 25-3-b du Statut, pour des crimes contre l’humanité (torture; viol et esclavage sexuel ; persécution de la population de Tombouctou pour des motifs religieux et sexistes ; et autres actes inhumains) ainsi que des crimes de guerre (viol et esclavage sexuel ; atteintes à l’intégrité corporelle et atteintes à la dignité de la personne ; attaques intentionnellement dirigées contre des bâtiments consacrés à la religion et monuments historiques ; et condamnations prononcées sans un jugement préalable, rendu par un tribunal régulièrement constitué et assorti des garanties judiciaires généralement reconnues comme indispensables) commis à Tombouctou, au Mali, entre avril 2012 et janvier 2013.
La situation au Mali a été déférée à la CPI par le gouvernement du Mali le 13 juillet 2012. Le 16 janvier 2013, le Procureur de la CPI a ouvert une enquête sur les crimes présumés commis sur le territoire du Mali depuis janvier 2012. L’affaire à l’encontre de M. Al Hassan est la deuxième affaire dans le cadre de cette situation après l’affaire à l’encontre de M. Al Mahdi déclaré coupable et condamné à neuf ans d’emprisonnement pour le crime de guerre consistant à diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments à caractère religieux et historique à Tombouctou, au Mali, en juin et juillet 2012.