Philippe Pétain : Un maréchal de France de la Grande Guerre comme les sept autres ?

Le maréchal (1918-1940) et collaborationniste (1940-1944) Philippe Pétain condamné à mort le 19 août 1945 et frappé d'indignité nationale.
Le maréchal (1918-1940) et collaborationniste (1940-1944) Philippe Pétain condamné à mort le 19 août 1945 et frappé d'indignité nationale.

Condamné le 19 août 1945 à la peine de mort et à la confiscation de tous ses biens et frappé d’indignité nationale, l’ex-maréchal Philippe Pétain, celui qui s’autoproclama « chef de l’état français » entre le 11 juillet 1940 et 20 août 1944 et collabora avec les nazis, peut-il être honoré, à l’instar des sept autres maréchaux de France, Joffre, Foch, Gallieni, Fayolle, Franchet d'Esperey, Lyautey et Maunoury, ce samedi 10 novembre 2018, à l’occasion du 100e anniversaire de l’Armistice de 1918 ? Le président de la République Emmanuel Macron répond par l’affirmative et son chef d'état-major sera présent à la cérémonie organisée samedi aux Invalides.

S’il est vrai qu’il contribua à la victoire de la bataille de Verdun en 1916 et fut fait maréchal de France en novembre 1918, il n’en demeure pas moins que rappelé au gouvernement le 17 mai 1940 lors de l'invasion allemande, Pétain, 84 ans, s'oppose à la poursuite d'une guerre qu'il considère comme perdue et succède dès le 16 juin 1940 à Paul Reynaud à la présidence du Conseil pour appeler, dès le lendemain, le 17 juin, à cesser le combat. Il signe « l’armistice du 22 juin 1940 » avec l'Allemagne d'Adolf Hitler et est investi des pleins pouvoirs constituants le 10 juillet 1940 par les deux chambres. Il s'autoproclame « chef de l'état français » le lendemain et, installé à Vichy, il abolit les institutions républicaines et les libertés fondamentales, il dissout les syndicats et les partis politiques, il instaure une législation antimaçonnique et antisémite dès août et octobre 1940, de sa propre autorité et sans pression de l'occupant allemand.

Le régime institué et dirigé par Pétain jusqu'en août 1944 sera déclaré « illégitime, nul et non avenu » par le général de Gaulle à la Libération. Jugé en juillet 1945 pour intelligence avec l'ennemi et haute trahison par la Haute Cour de justice, il est, par arrêt du 15 août 1945, frappé d'indignité nationale, condamné à la confiscation de ses biens et à la peine de mort — non appliquée en raison de son grand âge, elle sera commuée en emprisonnement à perpétuité par le général de Gaulle, alors chef du gouvernement provisoire de la République française.

Le titre de maréchal de France, rappelle l’article 4 de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires, constitue une dignité de l’État. Dignité dont a été privé Philippe Pétain pour avoir été condamné pour « indignité nationale ». S’il a sauvé sa tête, Pétain n’a pas récupéré sa dignité quels qu’aient pu être ses mérites lors de la Première Guerre.

Créée par l’ordonnance du 26 août 1944 dès la fin de l’occupation allemande, l’indignité nationale est en effet une infraction pénale d’une extrême grande gravité dont la sanction est la dégradation nationale, ce qui, au cas particulier, implique, entre autres, la perte du titre de maréchal et il n’y donc pas lieu de mettre sur le même pied d’égalité et d’honorer en 2018 un collaborationniste dégradé en 1945 au même titre que les sept autres maréchaux qui sont l’honneur de la France.

 « Il a été un grand soldat, c'est une réalité », réplique Emmanuel Macron qui défend, dans des images captées par France Info, l'hommage qui lui sera rendu samedi aux Invalides, estimant qu'il n'y avait pas de contradiction avec la condamnation de ses « choix funestes » par la suite.

« J'ai toujours regardé l'histoire de notre pays en face [...] Je n'occulte aucune page de l'histoire », a répondu le président de la République à certaines critiques contre la célébration de Philippe Pétain, considérant qu’il est « légitime que nous rendions hommage aux maréchaux qui ont conduit l'armée à la victoire, comme chaque année ». « Mon chef d'état-major sera présent », à la cérémonie organisée samedi aux Invalides, a-t-il ajouté, où un hommage sera rendu à Philippe Pétain et aux sept autres maréchaux de la Grande Guerre, cérémonie à laquelle participeront les responsables militaires français.

Une erreur hautement regrettable. À force de vouloir réconcilier et embrasser tout le monde et toutes les causes, y compris les plus abjectes, Emmanuel Macron va finir par mettre à néant les espoirs que des millions de Français avaient mis en lui. Dommage !