Portugal Telecom : Amende de 125 M€ pour Altice pour violation des règles de l'UE

Portugal Telecom

La Commission européenne a infligé une amende de 124,5 millions d'euros à Altice, la multinationale de câbles et de télécommunications basée aux Pays-Bas, pour avoir procédé à l'acquisition de l'opérateur portugais de télécommunications PT (Portugal Telecom) avant notification ou autorisation de la Commission.

« Les entreprises qui vont trop vite en besogne et procèdent à des concentrations avant notification ou autorisation nuisent à l'efficacité de notre système de contrôle des concentrations. C'est ce système qui protège les consommateurs européens de toute concentration susceptible d'entraîner une hausse des prix ou une réduction du choix. L'amende infligée par la Commission à Altice aujourd'hui traduit la gravité de l'infraction et devrait dissuader les autres entreprises d'enfreindre les règles de l'UE en matière de contrôle des concentrations.», a déclaré la commissaire chargée de la politique de concurrence Margrethe Vestager,

Pour permettre de prendre des décisions correctes dans ces délais serrés, le système de contrôle des concentrations de l'UE est fondé sur des règles de procédure claires que les entreprises doivent intégralement respecter pour garantir une concurrence équitable, rappelle la Commission qui souligne que les règles de l'UE en matière de concentrations requièrent des entreprises parties à la concentration qu'elles notifient leurs projets de concentration de dimension européenne à la Commission pour examen et qu'elles ne les mettent pas à exécution avant d'obtenir l'autorisation de la Commission, ce qui permet d'éviter les potentielles conséquences négatives irréparables des opérations sur le marché dans l'attente de l'issue de l'enquête de la Commission.

En février 2015, Altice a ainsi notifié à la Commission son projet d'acquérir PT Portugal. L'opération a été autorisée sous conditions par la Commission le 20 avril 2015, notamment sous réserve de la cession des branches portugaises d'Altice à l'époque, à savoir ONI et Cabovisão.

En mai 2017, la Commission a adressé à Altice une communication des griefs dans laquelle elle se disait préoccupée que l'entreprise ait procédé à l'acquisition de PT Portugal avant d'y avoir été autorisée et, en partie, avant même d'avoir notifié la concentration. Dans la décision de ce jour, la Commission confirme son avis préliminaire selon lequel Altice n'a pas respecté le règlement de l'UE sur les concentrations et lui inflige une amende de 124,5 millions d'euros.

La Commission est notamment parvenue à la conclusion que, d'une part, certaines dispositions de l'accord d'achat ont eu pour effet qu'Altice a acquis le droit légal d'exercer une influence déterminante sur PT Portugal, par exemple grâce à un droit de veto sur les décisions concernant l'activité ordinaire de cette dernière et, d'autre part, Altice a effectivement exercé une influence déterminante sur certains aspects des activités de PT Portugal, par exemple en lui donnant des instructions sur la manière de mener une campagne de marketing et en demandant et recevant des informations commercialement sensibles sur l'entreprise en dehors de tout accord de confidentialité.

La décision rendue aujourd'hui n'a pas d'incidence sur la décision de la Commission d'avril 2015 d'autoriser l'opération en vertu du règlement de l'UE sur les concentrations. L'appréciation de la Commission à l'époque était indépendante des faits reprochés à Altice dans sa décision d'aujourd'hui.

En vertu du règlement sur les concentrations, la Commission peut infliger des amendes allant jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires total des entreprises qui, de propos délibéré ou par négligence, violent les obligations de notification et/ou de suspension mais pour fixer le montant d'une amende, la Commission tient toutefois compte de la nature, de la gravité et de la durée de l'infraction, ainsi que des éventuelles circonstances atténuantes et aggravantes.

En l'espèce, Altice n'a respecté ni l'obligation de notification, ni l'obligation de suspension et la Commission estime que ces infractions sont graves en ce qu'elles portent préjudice au bon fonctionnement du système de contrôle des concentrations de l'UE. Il n'est par ailleurs pas contestable qu'Altice connaissait parfaitement les obligations qui lui incombaient en vertu du règlement sur les concentrations.

En tenant compte de tous ces facteurs, la Commission a conclu qu'une amende totale de 124,5 millions d'euros était à la fois proportionnée et dissuasive.

La concentration Altice/PT Portugal

C'est le 9 décembre 2014 qu'Altice a conclu un accord avec Oi, l'opérateur de télécommunications brésilien qui contrôlait PT Portugal, en vue de l'acquisition du contrôle exclusif de cette dernière. L'opération a été notifiée à la Commission en février 2015 et autorisée sous conditions en avril 2015. Au moment de la notification, les filiales portugaises d'Altice, Cabovisão et ONI, concurrençaient PT Portugal sur le marché portugais des services de télécommunications. La Commission craignait que l'entité issue de la concentration ne soit soumise à une pression concurrentielle insuffisante de la part des acteurs restants sur le marché des télécommunications fixes, ce qui aurait pu entraîner une hausse des prix pour les clients. La décision a donc été subordonnée à la cession d'ONI et de Cabovisão par Altice.

Autres procédures en matière de concentrations

En mai 2017, la Commission a infligé une amende de 110 millions d'euros à Facebook pour avoir fourni des renseignements inexacts ou dénaturés au cours de l'enquête menée par la Commission en 2014 au titre du règlement de l'UE sur les concentrations, concernant l'acquisition de WhatsApp par Facebook. Cette décision n'a pas eu d'incidence sur l'autorisation de l'opération par la Commission, en octobre 2014, sur la base du règlement de l'UE sur les concentrations, étant donné que la décision relative à l'autorisation était basée sur plusieurs éléments différents autres que ceux liés aux renseignements inexacts ou manquants.

En juillet 2017, la Commission a adressé trois communications des griefs distinctes, respectivement à Merck et Sigma-Aldrich, à General Electric et à Canon, affirmant que ces entreprises avaient violé les règles de l'UE en matière de concentrations : une adressée à General Electric et une à Merck et Sigma-Aldrich pour fourniture présumée de renseignements inexacts ou dénaturés ; et une à Canon pour réalisation présumée d'une concentration avant de l'avoir notifiée et d'y avoir été autorisée. Ces enquêtes suivent leur cours, indique la Commission.