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Présidentielle 2017 : Karine Le Marchand humanise Nicolas et les autres

Par Alfredo Allegra | LEXTIMES.FR |
De g. à dr. Arnaud Montebourg, Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy, Bruno Le Maire. Photomontage. De g. à dr. Arnaud Montebourg, Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy, Bruno Le Maire. Photomontage.

À mille lieues des outrances et du ton de L’émission politique de France 2, Une ambition intime de Karine Le Marchand sur M6 joue sur un registre complètement différent et rend sympatiques ou presque, quasi humains, en à peine 30 minutes chacun, quatre bêtes politiques candidats à la primaire de leur parti, Nicolas Sarkozy, Arnaud Montebourg et Bruno Le Maire, ou d’ores et déjà candidate déclarée à la magistrature suprême pour ce qui est de Marine Le Pen.

À l’instar de la célébrissime émission culte de déballage intime Le Divan d’Henry Chapier, en fine psychologue-psychanalyste avisée, sur la pointe des pieds, sans avoir l’air d’y toucher, Karine Le Marchand tire doucement mais sûrement les vers du nez de ses quatre invités en les mettant à l’aise, dans un magnifique décor qui leur ressemble ou, à tout le moins, qui ne leur est pas complètement étranger, avec plein de petits riens personnels et de photographies d’eux-mêmes et de leurs êtres chers.

Le résultat est tout simplement ahurissant, stupéfiant. Tout le monde, il est beau ; tout le monde, il est gentil. Aucune ombre ni point noir à signaler pour ces quatre politiques qui se situent aux extrêmes de l'échiquier politique. Non seulement, ces quatre candidats à l’élection présidentielle ne sont pas des monstres et n'ont pas été créés ex nihilo par le docteur Frankenstein avec des bouts de chairs mortes ramassés ici et là mais, de surcroît, Nicolas, Arnaud, Bruno et Marine seraient bel et bien des individus tout-à-fait quelconques, des anciens bébés faits et constitués tout-à-fait normalement de chair et de sang qui peuvent même, semble-t-il, avoir des sentiments comme tout un chacun.

On a ainsi une très belle famille recomposée pour Nicolas avec ses quatre enfants de trois mamans différentes plus un cinquième d’un précédent lit de la dernière qui est une femme « vraiment intelligente », assure l’ancien chef de l’État qui « aime protéger les femmes […] plus que les hommes » et qui n’a pas fait le déplacement pour rien puisque, grâce à Karine, il tutoie désormais Bernadette Chirac.

Rosette et verre de Bourgogne à la main pour accueillir Arnaud dont le père était ouvrier boucher, le grand-père de pure souche algérienne et qui — contrairement à ce que pourrait laisser penser son ton prétentieux et châtié qu’il a adopté lorsqu’il est arrivé, de sa province natale, à Paris pour suivre des études supérieures — n’a ni particule ni le moindre petit minuscule quartier de noblesse à son actif. Ce n’est que grâce à un concours doté de 300 000 francs [environ 45 700 €] qu’il a gagné à l’âge de 26 ans qu’il a pu « se meubler ». Sa chanson favorite est « 17 ans » (1975) de Claude François qu’il qualifie de « chanson politique » à laquelle il s’identifie et on peut difficilement retenir une larme lorsqu’il évoque la naissance prématurée de sa fille à six mois pour un kilo.

Fils de, bel homme, 1m90, bac +11 voire +18 selon certaines mauvaises langues, Bruno a épousé une roturière, Pauline, une artiste-peintre, contre l’avis de son père qui ne manifestait pas — comme c’est aussi le cas parmi la classe ouvrière selon Michel Onfray — « ses sentiments ». Père de deux enfants de 14 et 16 ans, il ne sait pas s’ils se droguent et/ou s’ils sont homos, il préférerait que ce ne soit pas le cas mais si ça devait l’être, ce qui compte c’est qu’ils soient « heureux ». Le soir, il aime lire de la poésie en allemand mais il aime également le sexe, le vin et les beaux paysages.

Karine s’est transformée en jardinier pour accueillir Marine qui aime les fleurs qui « embellissent le monde ». D’emblée, la cheffe frontiste apparaît ainsi nettement moins dure et plus humaine. Toujours proche de ses deux sœurs, Marine garde un très mauvais souvenir de ses petites classes car ses petites camarades ne l’invitaient guère et la maltraitaient pour les activités politiques de son père et le nom qu’elle portait, elle s’est donc employée à « minimiser les choses négatives et à valoriser les choses positives » mais le divorce de ses parents et le départ de sa mère lorsqu’elle a 16 ans sans que cette dernière ne demande le moindre droit de visite et d’hébergement a été, de nouveau, un « moment difficile » pour elle. L’humanisation et la dédiabolisation est à son comble lorsqu’on apprend qu’avocate en 1992 — et jusqu’en 1998 —, Me Le Pen a assuré des commissions d’office et a défendu des « clandestins » et qu’en moins d’un an, elle a eu trois enfants, Jehanne en 1998, et des faux jumeaux, Mathilde et Louis, en 1999. L’exclusion de son père du parti qu’il a fondé et qu’elle préside à présent a également été un « moment difficile » mais moins que ses accouchements en 1998/1999 et elle lui en veut.

On a donc appris des choses intéressantes à l’issue de ces 120 minutes mais le tout était néanmoins un petit peu déséquilibré : une seule femme pour trois hommes, un seul de la gauche extrême pour trois d’extrême droite ou de la droite extrême, un seul fonctionnaire (Bruno Le Maire) pour trois avocats, une seule candidate déclarée pour trois concourant à la primaire de leur parti,…

 

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