Présidentielle 2017 : Le débat avant le premier tour

Benoît Hamon, François Fillon, Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, débat du premier tour présidentielle 2017, 20 mars 2017. Capture d'écran Jon Helland/LexTimes.
Benoît Hamon, François Fillon, Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, débat du premier tour présidentielle 2017, 20 mars 2017. Capture d'écran Jon Helland/LexTimes.

Cinq des onze candidats en lice pour l’élection présidentielle 2017, Benoît Hamon, François Fillon, Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, ont eu l’occasion d’échanger hier soir, 34 jours avant le premier tour, pendant plus de trois heures, sur Tf1 et Lci sur ce que serait la France avec ou sans eux au cours des cinq prochaines années. La police d’audience était assurée par Gilles Bouleau et Anne-Claire Coudray.

Tous les cinq se voient comme l’unique sauveur possible d’une France en déclin et en faillite. Deux présumés délinquants mis en examen, François Fillon et Marine Le Pen, l’un pour enrichissement personnel pendant trois décennies et l’autre pour financement d’emplois au siège de son parti avec les deniers d’une Europe qu’elle honnit mais dont elle ne dédaigne pas les avantages pour joindre les deux bouts. Deux quasi-extrémistes, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon, qui se partagent les cendres d’un PS en déconfiture et d’un PC en déperdition mais sans aucune volonté de travailler ensemble. Et un jamais-élu, un nouveau venu en politique d’à peine 39 ans, Emmanuel Macron, un ancien banquier d’affaires et ancien collaborateur de l’actuel chef de l’État, qui, se positionnant formellement ni à gauche ni à droite, se voit bien en messie, en potentiel rassembleur de tout ce qui est susceptible de pouvoir graviter autour du centre, qu’il penche à gauche ou à droite, avec l’Europe et la « moralisation de la vie politique » pour seuls points communs.

Moins de 100 secondes pour chaque candidat pour mettre en avant ses idées quant aux 14 thèmes abordés. Et top chrono.

L’école primaire doit commencer dès l’âge de 5 ans et doit enseigner les fondamentaux, souhaite François Fillon qui voudrait qu’on leur inculque un peu plus de « respect » et de « discipline » et qu’ils portent l’uniforme. En zone prioritaire, renchérit Emmanuel Macron, ils ne savent ni lire ni compter et il faut donc plus d’heures de cours et réduire à 12 (25 pour Benoît Hamon) le nombre d’élèves par classe. Ce n’est pas si catastrophique, estime Jean-Luc Mélenchon qui indique que la France « produit le plus d’ingénieurs » et que l’apprentissage n’est pas si « mauvais ».

En matière de sécurité, il faut augmenter le nombre de policiers et gendarmes, de 5 000 pour Hamon et Fillon à 12 500 pour Le Pen, et le nombre de places de prison, de 16 000 pour Fillon à 40 000 pour le Pen. Mélenchon se concentrera davantage sur les « tricheurs du fisc » pour récupérer « nos biens » et Macron vise des amendes immédiates pour toutes les incivilités avec aussi un éloignement du territoire ou du quartier sur autorisation du juge.

200 000 immigrés entrent légalement en France chaque année et il faut arrêter, pour la candidate frontiste, non seulement l’immigration illégale mais également cette immigration légale car « on a rien à leur offrir », la solution-miracle pour résoudre deux maux (immigration et déficit) est de réduire l’aide médicale d’État, les subventions et autres générosités en faveur de ces populations qui n’ont rien à faire en France et parmi lesquelles s’y glissent des « terroristes ». Fillon est un cran plus bas avec une régulation des « flux » pour ces gens qui fuient — surtout — la pauvreté que l’on ne peut tous accueillir. Macron, lui, est pour des procédures plus rapides et plus efficaces de reconduite à la frontière, en concertation avec nos partenaires européens pour plus d’efficacité. La proportion d’étrangers est stable pour les deux candidats de gauche qui se démarquent sur le sujet et notamment Hamon avec la mise en place d’un visa humanitaire.

Sujet délicat, la laïcité a été le terrain d’affrontements, entre Le Pen et Macron sur le burkini et entre Le Pen et Mélenchon sur le voile. Le problème, pour Le Pen et Fillon, étant les musulmans et la religion musulmane avec un intégrisme qui menace l’intégration.

Interrogation et attaque de Hamon sur le financement de la campagne Macron qui, pourtant, prône transparence et moralisation de vie publique mais, en l’état, pas plus que ne le prévoit la loi. Les dons à En Marche ! vont de 1 à 7 500 euros avec un don moyen qui se situerait entre 50/80 euros, les noms des 32 000 généreux donateurs sont enregistrés, a-t-il affirmé, mais leurs coordonnées n’ont pas à être divulguées. Autre attaque de Macron par Le Pen sur le « candidat qui défend les intérêts privés des grands groupes [qui] pantoufle [et qui] vient ensuite en politique » et promesse de l’intéressé de faire sanctionner ces propos diffamatoires. Tous promettent plus de transparence et une moralisation de vie publique s’ils sont élus.

Fillon veut supprimer la durée légale de travail par la négociation sociale et Macron la maintient à 35 heures mais instaure davantage de souplesse et de liberté par des accords d’entreprise ou de branche avec, à la clé, une baisse des charges sociales et de l’impôt sur les sociétés. Hamon ne promet plus très fort d’abroger la loi El Khomri mais s’accorde avec Mélenchon pour une nécessaire réduction du temps de travail.

L’augmentation du pouvoir d’achat passe par le revenu universel pour Hamon, solution critiquée par les quatre autres candidats qui plaident pour une relance de l’investissement via une baisse des charges sociales (Fillon et Macron) ou des hausses ciblées pour certaines catégories (Le Pen et Mélenchon).

Aux deux extrêmes, Mélenchon et Le Pen, on promet une retraite à 60 ans, Macron veut aller vers un euro cotisé qui donnerait les mêmes droits pour tous à un horizon de 5 à 10 ans et Fillon ne cache pas qu’il faut passer l’âge de la retraite de 62 à 65 ans. L’idée novatrice de la soirée vient de Hamon qui met sur la table le don de trimestres de retraite excédentaires à son conjoint.

Sur le plan international, l’arrivée de Trump à la Maison Blanche et le départ annoncé de la perfide Albion en déconcertent plus d’un, plus d’Europe pour Hamon et Macron et sans doute Fillon mais la question de la place de l’Otan — avec qui et pour faire quoi — se pose.