Rentes : La Cour des comptes prône une suppression des majorations prises en charge par l’État

Cour des comptes

Dans un référé du 21 juillet dernier, aux ministres de l’économie et des finances Bruno Le Maire et de l’action et des comptes publics Gérald Darmanin, diffusé ce matin, le premier président de la Cour des comptes Didier Migaud recommande de « supprimer immédiatement la contribution budgétaire de l’État à la prise en charge des majorations des rentes » et, à défaut, leur suppression dans un délai compris entre cinq et dix ans, permettant de générer, selon le cas, une économie estimée, après impact sur les recettes d’impôt sur les sociétés (IS), entre 850 millions et 1,566 milliard d’euros sur les 20 prochaines années.

La Cour rappelle que le contrat de rente viagère est une forme particulière de convention de prêt à intérêt de droit privé dans laquelle le prêteur personne physique (le crédirentier) perçoit du débiteur qui peut être une société d’assurance, une mutuelle ou une personne physique (le débirentier) des versements périodiques d’un montant fixe, convenu à l’avance.

Après la seconde guerre mondiale, en raison de la forte inflation, différentes lois, votées entre 1948 et 1951, ont mis en place des dispositifs garantissant le pouvoir d’achat des rentes au moyen de « majorations légales » dont le coût a été financé sur crédits budgétaires, étant précisé que ces majorations — qui s’ajoutent au montant des rentes conventionnellement constituées — sont remboursées par l’État aux personnes ou organismes débiteurs.

Aujourd’hui, les 39 organismes débirentiers bénéficiaires des remboursements financés sur la ligne dite « programme 168 » sont 10 mutuelles et 29 sociétés d’assurances et parmi ces dernières, quatre perçoivent 70 % des crédits du programme 168 répartis au 1er janvier 2017 sur 521 146 bénéficiaires et représentant 151 millions d’euros pour l’année écoulée et 1,816 milliard d’euros jusqu’à l’extinction du dispositif qui interviendrait pour l’essentiel dans une vingtaine d’années.

Sauf circonstances historiques particulières, l’État n’a pas vocation à intervenir durablement, assène la Cour, a posteriori pour suppléer à « l’imprévoyance des parties notamment au regard d’événements extérieurs, tel une forte inflation », pour apporter « un palliatif aux conséquences financières pour les assureurs de l’indexation des contrats de rentes sur l’inflation » et d’ailleurs, relève-t-elle, le dispositif est fermé depuis 1987, les taux de revalorisation sont gelés depuis 1995 et le droit à majoration est soumis à une condition de ressources.

Le dispositif est appelé à s’éteindre progressivement d’ici une vingtaine d’années pour plus de 90 % des contrats en cours et il ne subsisterait qu’environ 15 000 personnes (3 %) qui auraient encore vocation à percevoir ces majorations de rentes au-delà de 2050, c’est une charge que les assureurs et les mutuelles peuvent assumer eux-mêmes et la Cour recommande donc une suppression immédiate ou, au pire, étalée sur les dix prochaines années.

Selon l’option retenue, l’économie pourrait se situer entre 1,05 et 1,82 milliard d’euros à laquelle il convient de déduire une somme de 250 millions d’euros représentant l’impact fiscal estimé du fait d’une minoration du résultat de ces sociétés par le provisionnement, dès l’entrée en vigueur de la réforme, « à due concurrence de la valeur actuarielle du risque transféré ». Une économie pour le budget de l’État qui pourrait être effective dès 2018.