Royaume-Uni : Démission du ministre de l'immigration qui employait une clandestine

Le ministre britannique de l’immigration Mark Harper a présenté avant-hier soir sa démission au premier ministre David Cameron lorsqu’il a « découvert » que la femme de ménage qu’il emploie depuis avril 2007 n’avait aucune autorisation de travailler au Royaume-Uni.
Dans sa lettre de démission mise en ligne par la BBC qui ne manque pas d’une certaine « drôlerie » pour un Français qui ne connaît pas le droit du travail britannique, M. Harper, 43 ans, explique qu’avant qu’il ne se décide à prendre la jeune femme à son service, il a vérifié au préalable, via une batterie de tests mis à disposition par l’administration fiscale (HM Revenue & Customs), qu’elle pouvait effectivement exécuter son travail moyennant un « contrat de services »en tant que « travailleur indépendant ».
Et bien qu’en pareille occurrence, il n’avait aucune « obligation légale » de vérifier qu’elle était autorisée à travailler au Royaume-Uni, M. Harper prit la précaution de prendre une photocopie du passeport de la dame pour vérifier son identité ainsi qu’une copie d’une lettre du ministère de l’intérieur datée du 26 janvier 2006 selon laquelle elle était autorisée à demeurer « indéfiniment » au Royaume-Uni et qu’elle avait le droit d’y travailler et de créer une entreprise. De toute évidence, M. Harper se contenta d’une copie de ces deux documents mais il ne les transmit pas au ministère de l’intérieur.
Toujours est-il, poursuit Mark Harper, que lorsqu’il rejoignit le cabinet de David Cameron en mai 2010, il envisagea de vérifier à nouveau la situation administrative de son employée mais ayant procédé « aux tests » en 2007 et ayant vu son autorisation de pouvoir demeurer indéfiniment au Royaume-Uni, il n’en fit rien. De même, le même scrupule le reprit lorsque le poste de ministre de l’immigration lui fut proposé en septembre 2012 mais, à nouveau, il n’en fit rien. « Et rétrospectivement, j’aurais dû vérifier de manière plus approfondie », admet-il aujourd'hui.
Il se fait — ironie du sort — que M. Harper porte depuis l’automne dernier, un projet de loi qui durcit fortement l’immigration outre-Manche et qui revient en seconde lecture ce lundi 10 février devant la chambre haute (House of Lords). Le texte imposera notamment aux employeurs et bailleurs des obligations en matière de « vérifications » et de « copies de documents » pour déceler « les faux grossiers ».
C’est dans ce contexte, nous dit Mark Harper, qu’il lui a paru « prudent » de vérifier que tous les documents de sa femme de ménage, d'origine sud-américaine selon le Sunday Times, étaient « en ordre » et il a donc essayé de mettre la main sur les deux photocopies que sa femme de ménage qui lui avait remises sept ans plus tôt. En vain. La semaine du 20 janvier 2014, il pria donc — un peu gêné, se doute-t-on — son employée de lui fournir un autre tirage des documents fournis au mois d’avril 2007, ce qu’elle fit le 4 février. Le lendemain, 5 février, il demanda à son secrétaire particulier de les transmettre aux fonctionnaires du service de l’immigration pour vérification et il apprit, le lendemain matin, que la dame était en situation irrégulière.
M. Harper considère ne pas être en faute et avoir respecté la loi à tout moment mais en tant que ministre de l’immigration, il est « conscient », écrit-il au premier ministre David Cameron, qu’il aurait dû s’imposer « des normes plus élevées »que celles applicables aux autres et c’est ce qui l’a conduit à démissionner pour retourner sur le banc des députés. Le premier ministre a accepté cette démission avec « beaucoup tristesse ».
Si une personne en situation irrégulière peut travailler sans être inquiétée pendant sept ans pour un parlementaire ou un ministre, on peut aisément comprendre que Londres ait besoin de durcir quelque peu sa législation en matière d’immigration et que ses réticences à rester en dehors de Schengen ne sont manifestement pas justifiées.