Royaume-Uni : L'église de scientologie autorisée à célébrer des mariages

Louisa Hodkin et Alessandro Calcioli, 23 févr. 2014. Photo Eglise de scientologie.

Le premier couple scientologue s’est marié dimanche dernier dans une chapelle londonienne de l’église de scientologie à la suite de la décision rendue, en décembre dernier, par la cour suprême du Royaume-Uni déclarant la chapelle « lieu de rassemblement pour culte religieux » pouvant être enregistrée comme « lieu de célébration des mariages » en application de la loi anglaise sur le mariage.

Depuis une décision de 1970 de la plus haute juridiction britanniqueCourt of appeal (Lord Denning MR, Winn and Buckley LJJ), Registrar General vs Segerdal, [1970] 2 QB 697. rejetant un recours de l’église de scientologie contestant le refus de l’officier d’état civil général d’enregistrer une chapelle d’East Grinstead (Angleterre) comme lieu de rassemblement pour le culte religieux au motif notamment que la scientologie « est davantage une philosophie sur l’existence de l’homme ou sur la vie qu’une religion », les scientologues anglais ne pouvaient se marier dans leur lieu de culte alors que leurs confrères écossais étaient autorisés à célébrer des mariages.

À l’origine de ce revirement de jurisprudence, Louisa Hodkin et Alessandro Calcioli, scientologues, 25 ans, qui souhaitaient se marier dans la chapelle qu’ils fréquentaient à Londres, 146 Queen Victoria Street, et qui sont partis en guerre, avec l’appui de la ministre du culte de leur chapelle Laura Wilks, contre l’arrêt Segerdal qui constituait un obstacle juridique majeur.

Pour aboutir à une position contraire à celle qui avait été adoptée par l’arrêtSegerdal, la cour suprême britanniqueSupreme Court of the United Kingdom (Lords Neuberger, Clarke, Wilson, Reed et Toulson), 11 déc. 2013, Michaelmas Term [2013] UKSC 77, Hodlkin and a. vs Registrar General of births, deaths and marriages. analyse par le menu deux décisions, l’une nord-américaine de 1979 (Malnak v Yogi 592 F.2d 197) et l’autre australienne de 1983 (Church of the New Faith v Comr of Pay-Roll Tax (Victoria) 154 CLR), pour tenter de cerner ce qu’est une « religion » et un « lieu de culte » et après avoir pris en compte l’évolution qui s’est produite en la matière au cours des dernières décennies, les cinq magistrats de la Haute juridiction sont unanimes pour admettre que la scientologie entre dans la définition de la religion et que sa chapelle doit être enregistrée de manière à ce que des mariages puissent y être célébrés.

Cette décision est par ailleurs un véritable et fort intéressant cours de droit sur l’art et la manière dont les mariages sont enregistrés outre-Manche — par l’officier de l’état civil — et célébrés, de manière religieuse dans « des lieux enregistrés » servant « au rassemblement pour le culte religieux » ou de manière laïque dans « des lieux agréés » qui peuvent être des hôtels ou tout autre lieu agréé.

La Cour suprême britannique a admis que « la définition de la religion et du culte doit être moderne et suffisamment large pour englober les religions pratiquées par la majorité de la population mondiale », se réjouit la branche française dans un communiqué qui, pour sa part, est considérée, en France, comme une secte et ses dirigeants ont été récemment condamnés pour« escroqueries en bande organisée » par un arrêt de la cour de cassationCrim. 16 oct. 2013, n° 12-81532, Aline Fabre et a. c/ ministère public et a. mais la question devrait être tranchée par la cour européenne des droits de l’homme qui en a été saisie.