Sondage : Les Français plébiscitent le secret des échanges avec leur avocat

À l’appui de son appel à une réforme de l’actuel système des écoutes qui permet d’écouter les conversations entre un avocat et un ancien président de la République lui-même avocat voire même entre un avocat et son bâtonnier, le barreau de Paris a commandé un sondage à l’Ifop pour« s’enquérir » de la compréhension des Français quant « aux enjeux liés au respect du secret professionnel ».
Deux questions ont été posées à un peu plus de 4 000 personnes. La première, assez longue, leur demandait si, dans le cadre d’une affaire de justice les concernant (divorce, litige de voisinage, délit routier, contrôle fiscal, litige commercial ou prud’homal), ils accepteraient que les échanges (dialogue, courrier, courriel, conversation téléphonique, etc…) avec leurs avocats puissent être versés au dossier du tribunal, retranscrits ou écoutés.
Il n’y a pas photo : 79 % des sondés ne veulent pas être écoutés mais, bizarrement, ils ne sont plus que 71 % à s’opposer à leur retranscription et seulement 67 % à ce que lesdits échanges soient versés au dossier du tribunal. Une déperdition de 12 % qui ne peut sans doute s’expliquer que par la longueur et l’incompréhension de la question. Autre enseignement de ce sondage
À 85 %, les Français disent, à la seconde question, que la protection du secret confié à son avocat est « une valeur fondamentale de notre société » et là, non plus, on ne relève pas de différence majeure selon le sexe, l’âge, la profession, le statut, la catégorie d’agglomération, la région ou la proximité politique des sondés.
Ce sondage prouve toutefois, selon le bâtonnier de Paris qui a lui-même été la cible d’écoutes téléphoniques, que « le renforcement de la protection du secret professionnel de l'avocat n'est pas une revendication corporatiste réservée aux seuls avocats » et plaide pour un système à l’américaine qui nécessite, pour pouvoir placer un avocat sur écoute aux États-Unis, que le procureur s'adresse à « un juge neutre et détaché » qui, en France, pourrait être le président du tribunal de grande instance ou le juge des libertés et de la détention, précise-t-il.
Actuellement, selon l’article 100 du code de procédure pénale, lorsque la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement, « le juge d'instruction peut [effectivement, ndlr], [...] prescrire l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications. Ces opérations sont effectuées sous son autorité et son contrôle. La décision d'interception est écrite. Elle n'a pas de caractère juridictionnel et n'est susceptible d'aucun recours ».
Le communiqué du barreau de Paris commentant ce sondage fait également allusion, en revanche, à l’article 706-95 du code de procédure pénale qui, lui, en matière de flagrance ou d'enquête préliminaire, ne permet « l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications » que sur décision… du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance à la requête du procureur de la République et uniquement pour une durée maximum d'un mois, renouvelable une fois, exactement comme cela se passe aux États-Unis.
Une différence de traitement entre le délinquant pris en flagrant délit et le mis en examen dont la culpabilité n'est pas démontrée qui ne se justifie sans doute pas.