Terrorisme : Les plus hauts magistrats judiciaires contre les réformes et projets législatifs en cours

Réunion annuelle des premiers présidents des cours d’appel, 1er fév. 2016. Photo Cour de cassation.

Moins de trois semaines après avoir réclamé un débat de société sur la justice lors de l'audience solennelle de rentrée, le premier président de la cour de cassation, Bertrand Louvel, réitère lors de la réunion annuelle des premiers présidents des cours d’appel en signant une délibération commune pour mettre en garde contre « les réformes et projets législatifs en cours » de l'exécutif.

« En ce début du XXIe siècle, la place faite à l'Autorité judiciaire [gardienne de la liberté individuelle, ndlr] au sein des institutions de la République suscite de légitimes et graves interrogations [... son rôle ...] est affaibli par des réformes et projets législatifs en cours », selon la délibération commune adoptée hier par le premier président de la cour de cassation et les premiers présidents de cours d'appel.

Les mises en cause répétées de l'impartialité de l'institution et de ceux qui la servent, se plaignent les hauts magistrats réunis, portent atteinte « à leur crédit et à la confiance que doivent avoir les citoyens dans leur Justice », dénonce le texte qui pointe la « complexité de notre organisation juridictionnelle » et appelle le constituant à reconnaître et asseoir l'Autorité judiciaire dans son rôle de« garant de l'ensemble des libertés individuelles », au-delà de la seule protection contre la détention arbitraire.

À cela s'ajoute une « pénurie persistante [des] moyens matériels et humains »qui ne lui permet plus de remplir ses missions et les chefs de juridiction sont conduits, est-il expliqué, à donner priorité « au traitement de certains contentieux, en contradiction avec le principe d'égalité ».

La solution consiste, car solution il y a pour les signataires de la motion, à porter le budget de la justice judiciaire « à la hauteur de ses missions, de revoir l'organisation des juridictions et de moderniser les procédures et voies de recours », outre une indispensable réforme garantissant que l'Autorité judiciaire soit « soustraite à toute forme d'influence » ce qui passe par un renforcement des pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature.

Pour les hauts magistrats judiciaires, l'urgence réside dans des réformes qui « garantissent, en toute circonstance, à nos concitoyens, l'accès à un juge indépendant et impartial » et non à la mise en place, quels qu'en soient les motifs et justifications louables, d'un État-policier qui, tôt ou tard, au fur et à mesure que se répètent les exactions, ne rogne, petit à petit, une à une, nos libertés.