: Prévenir au lieu de guérir les difficultés des entreprises

Pour agir en amont de la cessation des paiements, une entreprise a la possibilité d'entamer une phase de négociation avec ses créanciers sous l’égide du président du tribunal de commerce pour anticiper ses difficultés et éviter l’ouverture d’une procédure collective (redressement, liquidation judiciaire,...). L'objectif de ces démarches préventives est l’obtention d’un accord amiable afin d’assainir le passif avant qu’il ne soit trop tard.

Un service public préventif et de proximité

Face à des difficultés économiques et financières, les entrepreneurs sont trop souvent seuls. Peu d’entre eux savent qu’ils peuvent demander à être reçus par le président du tribunal de commerce en vue d'exposer les difficultés qu'ils rencontrent. Depuis la loi de sauvegarde des entreprises, dite LSE, ce dernier s’est en effet vu confier une mission de prévention des difficultés des entreprises. Deux procédures préventives sont dès lors à la disposition du chef d’entreprise : le mandat ad hoc et la conciliation. 

Elles sont ouvertes aux entreprises commerciales, artisanales et libérales qui ne sont pas en état de cessation de paiement (ou, dans le cas de la conciliation, le sont depuis moins de 45 jours). Les demandes des chefs d’entreprise sont acceptées dans plus de 80 % des cas et en moins de 6 jours en moyenne. En outre, les décisions sont rendues en moins de 4 mois.

Malgré la forte augmentation du nombre de demandes adressées aux présidents des juridictions commerciales depuis les années 2000, de nombreuses TPE et PME ignorent encore ces dispositifs et arrivent souvent devant le tribunal de commerce alors qu'il est déjà trop tard. En 2011, une seule procédure préventive s’ouvrait pour 20 ouvertures de procédures collectives. Le formulaire de demande de rendez-vous est téléchargeable directement sur infogreffe.fr.

En 2013, plus de 55 000 ouvertures de procédure collective ont eu lieu en France d’après l’observatoire statistiques du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (+2,6 % par rapport à 2012). La majorité de ces ouvertures concernaient des liquidations judiciaires (35 %), suivis des ouvertures de liquidations judiciaires simplifiées (30 %) et des ouvertures de redressements judiciaires (28 %). 

Entretien avec le président du tribunal de commerce - Mandat ad hoc et conciliation

Les mesures préventives des difficultés peuvent être initiées par le président du tribunal de commerce ou directement par les chefs d'entreprises eux-mêmes. Ainsi, dès l'apparition de ces difficultés ou lorsque d'autres solutions telles que la médiation du crédit (pour les difficultés bancaires) n'ont pu aboutir, les dirigeants peuvent solliciter un entretien avec le président du tribunal de commerce ou présenter directement une demande de mandat ad hoc ou de conciliation. Une entreprise peut ainsi obtenir, par exemple, un délai de paiement de la part d'un créancier, voire une ligne de crédit bancaire supprimée rétablie par l'établissement, mais aussi régler un conflit entre associés ou avec un fournisseur. La procédure du mandat ad hoc répond généralement à une difficulté ponctuelle de l'entreprise tandis que la conciliation est adaptée à une situation plus globale, l'une et l'autre pouvant se compléter. 

Le mandat ad hoc permet de rechercher, avec l'aide du mandataire, les meilleures solutions de rétablissement de l'entreprise. Comme par exemple d’échelonner les dettes. Le chef d’entreprise reste en place, le mandataire ayant un rôle d’assistant et de conseil. À la demande du premier, le deuxième est dessaisi aussitôt.

La conciliation permet la mise en place d'un accord, dont le but est de trouver un équilibre entre les intérêts des parties et la pérennité de l’entreprise. Il peut prendre la forme de la mise en place de délais de paiement, de remises de dettes, de remises d’intérêts de retard,...

Un accord sous le sceau de la confidentialité

Le président du tribunal de commerce (qui est lui-même un commerçant) nomme, à la demande du chef d'entreprise, un mandataire ad hoc ou un conciliateur, généralement un administrateur judiciaire, qui sera chargé de négocier avec les différentes parties en conflit. Le chef d'entreprise peut proposer le nom d'un mandataire. Il peut aussi récuser le professionnel désigné. La durée de la procédure amiable est illimitée pour le mandat ad hoc, souvent renouvelé de façon trimestrielle. Elle est fixée à quatre mois pour la conciliation (une prorogation du délai correspondant à un mois supplémentaire est possible à la demande du conciliateur). Dès l’entretien informel avec le président du tribunal de commerce, la confidentialité est totale. Ce sera le cas pendant toute la durée de la procédure préventive retenue. Sans l’accord du chef d’entreprise, ces procédures sont toujours exemptées de publicité et restent confidentielles.

Une procédure qui se veut rassurante

Le chef d’entreprise bénéficie d’une procédure préventive qui reste dans la confidentialité de la justice, sous l’égide du président du tribunal de commerce, lui-même commerçant rompu aux complexités du monde des affaires. Le tribunal de commerce encourage et soutient la réactivité des porteurs de solutions aux difficultés naissantes.

La nomination du mandataire ad hoc ou du conciliateur, tiers indépendant, rassure les créanciers impliqués : il dresse un état objectif de la situation de l’entreprise et il agit sous l’autorité du président du tribunal de commerce ce qui garantit l’écoute des différents créanciers. 

Lorsqu’un accord est trouvé, le tribunal lui donne force exécutoire et celui-ci reste confidentiel. Il permet au chef d’entreprise d’être protégé pendant la durée de l’accord de toute poursuite individuelle sur son patrimoine et lui permet de lever de plein droit l’interdiction d’émettre des chèques. Il permet également aux créanciers parties à l’accord d’être protégés d’une éventuelle action en responsabilité pour soutien abusif de l’entreprise. De plus, en cas d’ouverture de redressement ou de liquidation judiciaire, ils seront prioritaires par rapport aux autres créanciers antérieurs à l’ouverture de la conciliation s’ils ont accordé un nouvel apport en trésorerie permettant à l’entreprise de poursuivre son activité.

Avantages

Ces procédures sont confidentielles aussi longtemps que souhaité par le chef d’entreprise. Le chef d’entreprise reste maître à bord et poursuit son activité. Le choix du mandataire ou du conciliateur est possible. Mission circonscrite au périmètre défini par le chef d’entreprise.
Tous ces avantages peuvent faire sauter le barrage psychologique que peut ressentir le chef d’entreprise à utiliser ces procédures amiables dès les premières difficultés de sa société. 
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* Infogreffe regroupe l'ensemble des greffes des tribunaux de commerce de France.