Livres : Le vol du gerfaut

Le vol du gerfaut

Le journaliste-chroniqueur littéraire-écrivain marseillais Jean Contrucci, 78 ans, met en scène dans ce roman à l’accent légèrement autobiographique « Le vol du gerfaut » un « grand » auteur contemporain goncourisé, Jean-Gabriel Lesparres, qui n’a plus rien publié depuis une dizaine d’années, directeur et chroniqueur littéraire, 75 ans environ, qui n’est guère « satisfait » de son dernier manuscrit « Comme un vol de gerfauts » de trop qu’il s’est pourtant engagé à livrer à son éditeur incessamment sous peu et dont il va organiser le vol et la destruction avec le concours d’un jeune homme, lui aussi écrivain à ses heures, qui comprend aussi bien que lui qu’il faut avoir « le courage de détruire ce qu’on juge indigne de soi ».

Au retour de ses vacances à Palerme, en Sicile, avec son épouse qui a moins de la moitié de son âge, à l’aéroport, au moment de récupérer ses bagages, JGL va donc ainsi être la victime — consentante — par Manuel Botero du vol de son attaché-case contenant le manuscrit du roman honni dans « trois grands cahiers à spirale, format 21 x 29,7 à grands carreaux, couverture bleu roi ». Son éditeur n’est pas dupe, il n’en croit rien et lui enjoint de livrer dans les mois qui suivent le roman pour lequel il a reçu, il y a deux ans déjà, un à-valoir conséquent. Rebondissement inattendu, il reçoit les épreuves de ce qu’il reconnaît être son piètre roman sous le nom d’une jeune inconnue alors que Botero lui avait assuré en avoir fait des confettis avant de le mettre à la décharge.

Dans « Comme un vol de gerfauts », le narrateur a le mérite d’avoir voulu détruire une œuvre imparfaite, une œuvre en-dessous de ses précédentes, JC, en revanche, avec « Le vol du gerfaut »Le vol du gerfaut, Jean Contrucci, Éditions Hervé Chopin, Paris, janv. 2018, 236 p., 19 €., n’a pas eu cette exigence et est allé jusqu’au bout, son éditeur considérant même qu’il s’agit d’un « texte d’une grande générosité, qui aborde les petites et les grandes peurs de la vie. On est frappé par son humilité, son humour et son élégance. À l’image de son écriture ».

On est en fait surtout frappé par une certaine misogynie d’assez mauvais goût telle, par exemple, cette jeune femme lieutenant de police qui « se leva, ce qui [lui] permit de constater qu’elle avait du mal à caser dans sa jupe l’intégralité de son derrière de jument » ou s’agissant de l’épouse de son éditeur et ami, la « choucroute qu’elle arborait évoquait ce jour-là un coucher de soleil sur la mer Rouge par temps d’orage et son visage calciné aux U.V. semblait tartiné de pâte chocolatée ». On cherche vainement l’humilité, l’humour ou l’élégance dans ces descriptions qui ne contribuent guère à ce que ce gerfaut prenne son envol.