Théâtre : Le double

« Le double » (2019), adaptation libre du roman éponyme (1846) de Fiodor Dostoïevski (1821-1881), mis en scène par Ronan Rivière. Avec Ronan Rivière (Iakov Petrovich Goliadkine), Jérôme Rodriguez (Nikolaï Semionovitch), Laura Chetrit (Clara Olsoufievna), Michaël Giorno-Cohen (Pietrouchka), Jean-Benoît Terral (Olsoufi Ivanovitch), Xavier Lafitte (le double) et Olivier Mazal (pianiste). Au théâtre le Ranelagh
Il s’agit, explique Ronan Rivière qui signe également la mise en scène et qui s’est réservé le rôle-titre de Goliadkine, d’une adaptation « libre » du deuxième roman de Dostoïevski « le Double », qui avait été très mal accueilli à l’époque et qu’il avait d’ailleurs tenté de réécrire vingt ans plus tard, précisant que s’il s’est « appuyé sur la trame » de l’œuvre dont il a emprunté le titre, il s’est aussi inspiré de « l’univers de Gogol et des Nouvelles de Pétersbourg (notamment le Nez, le Manteau et le Journal d’un fou) » pour en faire une « comédie fantastique et poétique » qui se veut « drôle, active et troublante ».
La trame du « Double » est Iakov Petrovitch Goliadkine, un paisible fonctionnaire très timide qui vit seul à Saint-Pétersbourg, avec son valet Pietrouchka, dans un immeuble de rapport situé rue des Six-Boutiques. Il va être la risée de tous, et surtout de Clara qu’il voudrait conquérir, avec ses nouvelles bottes à l’ancienne à un moment où les tenues vestimentaires se libéralisent et s’occidentalisent.
Mais très vite, sa vie va être bouleversée par l’apparition de son double — en tous points d’apparence quasi identique physiquement mais en fait complètement à l’opposé aussi en ce que le double est beau, charmeur, volubile, exubérant,… — qui va s’inviter chez lui, au travail et en tous lieux pour lui ravir, petit à petit, son travail et sa vie ou ce qu’il en reste.
On perçoit certes mal la frontière entre le rêve et la réalité, entre le conscient et l’inconscient, ni qui est le plus fou des deux ni à quoi tout cela rime-t-il mais Ronan Rivière semble en tout cas avoir atteint son objectif qui était, dit-il, de « créer une comédie troublante, faite de l’étoffe de nos rêves et d’inspiration fantastique, et d’entraîner le spectateur dans la folie et la confusion, avec un humour en demi-teinte ».
Plus terre à terre et au second degré, il s’agit de ce double qui est en chacun de nous. Cette part enfouie de timidité, de féminité voire de tout autre chose innommable qui nous pousse à faire ou à ne pas faire cette chose dont on a envie ou pas et qui satisfaite ou non peut conduire à la folie ou dans des zones voisines.