Continental : Cassation de la condamnation in solidum avec la société mère

La cour de cassation a cassé partiellement les 542 arrêts de la cour d’appel d’Amiens en ce qu’ils avaient déclaré la société mère de Continental France, la société de droit allemand Continental AG, coemployeur des salariés de sa filiale.
À la suite de la décision de fermeture du site de production de pneumatiques exploité à Clairoix (Oise) où se trouvaient plus de mille salariés, la société Continental France, entité du groupe Continental et filiale française à 100 pour cent de la société de droit allemand Continental Aktiengesellschaft (AG), a mis en œuvre en 2009 une procédure de licenciement pour motif économique avec un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) visant l’ensemble du personnel de l’établissement, au terme de laquelle les contrats de travail des salariés non reclassés ont été rompus par des lettres de licenciement notifiées pour la plupart le 15 janvier 2010 ou par des conventions de rupture amiable signées pour la plupart le 2 janvier 2010 dans le cadre de congé de mobilité.
Contestant la légitimité de la rupture de leur contrat de travail, des salariés ont attrait devant la juridiction prud’homale non seulement leur employeur mais également la société Continental AG en tant que coemployeur.
Pour faire droit à ces demandes et condamner la maison mère à payer in solidum avec sa filiale des dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse aux salariés, les juges du fond avaient retenu qu’au moment de la décision de fermeture du site de Clairoix, la société mère exerçait « un contrôle étroit et constant sur la société Continental France, filiale à 100 %, qui, bien que disposant de dirigeants propres, était dépourvue d’autonomie réelle, les choix stratégiques ainsi que les décisions importantes en matière de gestion économique et sociale étaient prises au niveau de la direction de la société mère et les autres, étroitement contrôlées, devant être avalisées et répondre à des critères imposés ».
Pour la cour d’Amiens, Continental AG imposait à sa filiale « ses choix et orientations économiques en fonction de ses intérêts et de ceux du groupe, notamment en termes de produits, volumes de production, clients et prix, des ratios de performance opérationnelle et les objectifs à atteindre sous la menace de se désengager financièrement vis-à-vis de sa filiale », itou en matière de gestion des ressources humaines et en avait déduit que les décisions de restructuration et de fermeture de l’établissement de production de Clairoix « ont été prises, pour des raisons de pure stratégie industrielle destinées à améliorer les performances du groupe dans le secteur considéré » au niveau de Continental AG et imposées à Continental France chargée de les mettre en œuvre sous le contrôle étroit de la société mère.
Ce n’est pas l’avis de la chambre sociale de la cour de cassation
Le fait que la politique du groupe déterminée par la société mère ait une incidence sur l’activité économique et sociale de sa filiale ou que la société ait pris des décisions affectant l’avenir de sa filiale et se soit engagée à garantir l’exécution des obligations de sa filiale ne suffisent à caractériser, précise la juridiction suprême, « une situation de coemploi ». L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Douai qui devrait, en toute logique, mettre la société mère hors de cause.