Droit à un procès équitable : Information du prévenu appelant de la date d’audience

Un prévenu appelant doit s'attendre à être convoqué devant la cour d'appel
Un prévenu appelant doit s'attendre à être convoqué devant la cour d'appel.

L’assemblée plénière de la Cour de cassation ne s’est pas laissée démonter malgré un détour par Strasbourg et a sereinement jugé vendredi, après plus de huit ans de procédure, qu’un prévenu qui interjette appel d’une condamnation doit s’attendre à être convoqué devant la juridiction d’appel et il lui appartient donc « de faire diligence en retirant au plus tôt la lettre de l’huissier de justice » l’invitant à se présenter à son étude.

En l’espèce, une dame avait aménagé un terrain en violation des règles d’urbanisme et avait été condamnée à une amende avec sursis de 2 000 euros et la remise en état des lieux sous astreinte. Appel interjeté avec comme adresse une boîte postale, elle a été informée par l’huissier, par l’envoi d’une lettre à cette boîte postale, qu’elle devait retirer à son étude l’acte l’informant de la date d’audience, ce qu’elle n’a pas fait et elle n’était ni présente ni représentée lors de l’audience devant la cour d’appelLyon, 7e ch., 19 févr. 2016. qui a estimé que l’huissier avait respecté les règles de procédure et a confirmé la décision entreprise.

Estimant toutefois n’avoir pas été régulièrement avisée de la date à laquelle aurait lieu l’audience, elle a alors formé un pourvoi jugé irrecevable au motif qu’il avait été formé hors délai et c’est ainsi qu’à l’occasion d’une saisine de la Cour européenne des droits de l’homme, le gouvernement français a fait une « déclaration unilatérale » reconnaissant que, dans ce dossier, la décision d’irrecevabilité du pourvoi portait atteinte au droit à un procès équitable garanti par l’article 6 § 1 de la Convention.

Saisie après cette péripétie, la Cour de révision et de réexamen a eu, pour la première fois, l’occasion de juger que le réexamen d’un dossier est possible non seulement après une condamnation de la France par la Cour de Strasbourg mais également à la suite d’une déclaration unilatérale de la France devant cette Cour et c’est dans ces circonstances que l’affaire a été renvoyée devant l’assemblée plénière de la Cour de cassation pour que le pourvoi litigieux soit réexaminé.

Le pourvoi est certes jugé recevable mais il n’en demeure pas moins que la Cour de cassation, dans sa formation la plus solennelleAss. pl., 3 mars 2023, n° 22-81097., confirme la décision critiquée en soulignant que le prévenu qui a déclenché une procédure d’appel doit « s’attendre à être convoqué devant la cour d’appel » et si l’huissier ne trouve personne à l’adresse par lui donnée dans l’acte d’appel, il n’a pas à vérifier si le prévenu y demeure effectivement et doit simplement « l’informer du fait que la citation doit être retirée à son étude », précisant que l’envoi de la lettre recommandée avec avis de réception suffit à « rendre la procédure régulière » et il incombe au prévenu, le cas échéant, d’invoquer l’éventuelle force majeure qui l’aurait mis dans l’impossibilité « de prendre connaissance, en temps utile, de la lettre de l’huissier de justice » dans l’hypothèse, par exemple, d’une « défaillance du système postal ».

Ces règles ne méconnaissent ni les droits de la défense ni le droit à un procès équitable, selon la Haute juridiction qui estime qu’elles participent d’une bonne administration de la justice en permettant (i) au prévenu d’être effectivement informé de la date de son audience, (ii) de faire échec à la mauvaise foi ou à la négligence de ceux qui déclarent une adresse inexacte et (iii) de tenir compte du comportement de ceux qui ne retirent pas la lettre recommandée qui leur a été adressée.