Asile : Un dispositif adapté doit être mis en place dans les établissements pénitentiaires

La demande d'asile pour les personnes incarcérées doit être adaptée.
La demande d'asile pour les personnes incarcérées doit être adaptée.

Par sept ordonnances distinctes, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder à l’enregistrement de la demande d’asile de sept personnes incarcérées à la maison d’arrêt de Fresnes et de leur délivrer, sous réserve qu’ils remplissent les conditions prévues et que leur demande relève de la compétence de la France, l’attestation de demandeur d’asile.

Interpellées à l’aéroport dès leur arrivée en France puis détenues sous mandat d’arrêt extraditionnel ou condamnées en comparution immédiate à une peine complémentaire d’interdiction du territoire, aucune de ces sept personnes n’avait été en mesure de déposer une demande d’asile avant son incarcération et ne pouvant obtenir une permission de sortir afin de se rendre, comme le prévoient les textes en la matière, au guichet de la préfecture pour y faire enregistrer leur demande, elles ont vainement soumis à la préfecture, avec l’aide et le soutien de quatre associations, Droits d’urgence, la section française de l’Observatoire internationale des prisons, la Cimade et le Gisti, leur demande par courrier postal, en application d’un « protocole interne dédié datant de 2015 » qui n’avait jamais été appliqué et qui a été « révisé concomitamment à leur demande ».

Pour faire à leur demande, le juge de l’urgenceTA Melun, ord., 13 mars 2019, notamment n° 1902255. retient que le législateur a « souhaité qu’un étranger puisse […] faire valoir son droit à déposer une demande d’asile, y compris s’il est incarcéré » et en cette hypothèse, c’est aux « modalités procédurales » de s’adapter aux « contraintes particulières pesant sur les personnes incarcérées », c’est-à-dire, précise le tribunal, qu’il « appartient aux services pénitentiaires d’orienter la demande vers les services préfectoraux chargés de l’enregistrement des demandes » et à ces derniers de « rechercher, notamment en tant que de besoin en coordination avec les services pénitentiaires, des modalités adaptées de recueil des éléments nécessaires pour l’examen et l’enregistrement de cette demande » dans la mesure où, effectivement, est-il souligné, un étranger condamné à une peine complémentaire d’interdiction du territoire français ne peut obtenir une autorisation de sortie que pour préparer une demande en relèvement de cette peine et qu’il ne peut en bénéficier pour accomplir « une obligation exigeant sa présence comme présenter une demande d’asile au guichet de la préfecture ».

Les étrangers détenus et condamnés à une peine complémentaire d’interdiction du territoire français ne sont donc pas soumis, juge le tribunal, au « droit commun en matière d’enregistrement de leur demande d’asile », puisqu’ils « ne peuvent, faute de pouvoir bénéficier d’une permission de sortie, se rendre personnellement au guichet de la préfecture » et c’est dès lors aux services préfectoraux de « mettre en œuvre un dispositif adapté de recueil et d’enregistrement de leur demande d’asile ne nécessitant pas leur déplacement en préfecture ».

Pour le juge de l’urgence de Melun, l’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale est justifiée par le droit constitutionnel d’asile qui a le caractère d’une liberté fondamentale et qui a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié.

Dès 2014, le Contrôleur général des lieux de privation de libertéCGLPL, avis du 9 mai 2014 relatif à la situation des personnes étrangères détenues, § 13. avait mis le doigt sur le « caractère systémique de l’impossibilité de solliciter l’asile » pour les personnes détenues dans la quasi-totalité des établissements pénitentiaires.