Contrats administratifs : La demande d'indemnisation peut être liée en cours d'instance à celle d'annulation du contrat

Hôtel de ville d'Enghien-les-Bains.

Par un avis en date du 11 mai 2011, publié aujourd’hui au Journal OfficielCE, avis, 11 mai 2011, n° 347002, J.O., n° 120, 24 mai 2011, p. 8962, n° 61., le Conseil d’État rappelle que si le candidat évincé sollicite l’annulation du contrat, ses demandes indemnitaires sont soumises à la demande préalable à l'administration de droit commun pour lier le contentieux mais peuvent être déposées au-delà du recours de deux mois.

En l’espèce, la société Rebillon Schmit Prévot demandait au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d’annuler le contrat conclu un 6 avril 2009 entre la commune d’Enghien-les-Bains et la société OGF portant sur la reprise de sépultures au cimetière Nord d’Enghien. Parallèlement aux conclusions tendant à l’annulation du contrat, la société Rebilllon avait ensuite présenté des conclusions indemnitaires, après avoir "adressé une demande d'indemnisation préalable" et avoir attendu "le délai minimum de deux mois pour obtenir une décision [implicite] de rejet", nous précise Pierre Caillarec, responsable juridique de la société Rebillon Schmit Prévot, dans un courriel du 25 mai 2011.

La société Rebillon, indique M. Caillarec, soutenait qu'elle pouvait procéder à la liaison du contentieux en cours d'instance alors que la commune d'Englien-les-Bains soutenait que « les conclusions indemnitaires dans le cadre du recours 'Tropic'CE, Ass., 16 juill. 2007, n° 291545, société Tropic travaux signalisation c/ Chambre de commerce et d'industrie de Pointe-à-Pitre. sont dispensées de l'obligation de liaison du contentieux mais doivent en revanche être présentées dans le délai de recours de deux mois ».

Estimant que la requête de la société Rebillon soulevait une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transmis le dossier au Conseil d’ÉEtat pour avis, conformément aux dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative. 

Et que nous dit cet avis ? Le Conseil d’État, rappelle la jurisprudence Tropic précitée selon laquelle « tout concurrent évincé de la conclusion d’un contrat administratif est recevable à former devant le juge du contrat, dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées, un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses qui en sont divisibles, afin d’en obtenir la résiliation ou l’annulation ». Mais en vue d’obtenir réparation de ses droits lésés, le concurrent évincé a aussi la possibilité de présenter devant le juge du contrat des conclusions indemnitaires, « à titre accessoire ou complémentaire à ses conclusions à fin de résiliation ou d’annulation ». Il peut également engager un recours de pleine juridiction distinct, tendant exclusivement à une indemnisation du préjudice subi à raison de l’illégalité de la conclusion du contrat dont il a été évincé.

Et c’est là que le Conseil d’État précise que dans les deux hypothèses évoquées, « la présentation de conclusions indemnitaires par le concurrent évincé n’est pas soumise au délai de deux mois suivant l’accomplissement des mesures de publicité du contrat, applicable aux seules conclusions tenant à sa résiliation ou à son a annulation ».

La recevabilité des conclusions indemnitaires, présentées à titre accessoire ou complémentaire aux conclusions contestant la validité du contrat, est en revanche soumise, selon les modalités de droit commun, à l’intervention d’une décision préalable de l’administration de nature à lier le contentieux, « le cas échéant en cours d’instance, sauf en matière de travaux publics ». La juridiction suprême administrative rappelle aussi in fine qu’elles doivent, à peine d’irrecevabilité, être motivées et chiffrées.

LexTimes.fr remercie la société Rebillon Schmit Prévot pour les précisions qu'elle a bien voulu lui apporter pour une bonne compréhension des faits et de la procédure.