Informatique et libertés : La CNIL sommée d'anonymiser une décision concernant un tiers

Le Conseil d'État a enjoint à la présidente de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) de procéder à l'anonymisation des mentions d'une décision concernant un tiers. Rude coup pour une institution qui est supposée veiller à faire respecter des droits et libertés qu'elle ne respecte pas elle-même.
En l'espèce, au mois d'août 2012, l'un des syndicats de la société Total raffinage marketing a saisi la CNIL d'une plainte relative à l'organisation des élections professionnelles qui devaient se tenir au mois d'octobre 2012 en utilisant un système de vote électronique mis en place par la société Election Europe et à l'issue de l'instruction contradictoire de cette plainte, la formation restreinte de la CNIL, constatant plusieurs manquements à la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, a, par une délibération du 11 avril 2013, infligé à la société Total raffinage marketing la sanction de l'avertissement et l'a assortie d'une publication sur son site internet et sur le site Légifrance.
La société Election Europe n'était pas poursuivie par la CNIL dans le cadre de cette procédure et n'a fait l'objet d'aucune sanction, selon le dispositif de la délibération contestée mais la formation restreinte de la CNIL fait mention dans les motifs de ce que le système de vote électronique en litige était élaboré par cette société qui avait d'ailleurs présenté, de sa propre initiative, des observations au cours de la procédure à laquelle elle n'avait pas été attraite. Elle a donc demandé à la CNIL, le 24 juin 2013, que les mentions de la délibération de sanction du 11 avril 2013 la concernant ne soient pas publiées et c'est cette demande qui a été rejetée le 19 août 2013 par la présidente de la CNIL.
C'est vainement que la CNIL a opposé une fin de non-recevoir tirée de ce que la société Election Europe ne pouvait demander à ce qu'il lui soit enjoint « de procéder à une anonymisation de la décision faute d'avoir présenté en ce sens une demande préalable », la Haute juridiction administrative
« Lorsqu'un tiers demande soit qu'il ne soit pas procédé à la publication des mentions le concernant figurant dans une décision de sanction prononcée par la CNIL dont le dispositif ne lui fait pas grief, soit l'anonymisation de telles mentions dans la version publiée de cette sanction, l'autorité compétente est tenue de faire droit à cette demande, sous la seule réserve de la vérification de l'existence des mentions en litige », jugent les Sages du Palais-Royal sans faire grand cas des gesticulations de la CNIL ni de sa présidente et, y ajoutant, une indemnité de 3 000 euros que la CNIL devra verser à la société Election Europe au titre des frais irrépétibles. La CNIL a obtempéré selon les vérifications auxquelles a procédé LexTimes.fr, la décision ne figure plus sur son site et Légifrance a procédé à son anonymisation.
Dans une autre requête entre les mêmes parties jugée