Migrants : Le Conseil d’État ne suspend pas la circulaire Collomb

Après avoir précisé la lecture qu’il convenait de faire de la circulaire du 12 décembre 2017, dite circulaire Collomb, concernant les informations pouvant être recueillies par les équipes intervenant en centres d’hébergement, leurs pouvoirs et le respect de la législation relative à la protection des données à caractère personnel, le juge des référés du Conseil d’État ne prononce pas la mesure de suspension sollicitée en estimant que la condition d’urgence fait défaut.
Par circulaire du 12 décembre 2017, les ministres de l’intérieur Gérard Collomb et de la cohésion des territoires Jacques Mézard ont prescrit aux préfets de « bâtir localement un dispositif de suivi administratif robuste des personnes étrangères en hébergement d’urgence » reposant sur l’intervention dans l’ensemble des structures d’hébergement d’urgence, y compris hôtelières, d’équipes mobiles constituées, notamment, d’agents de préfecture et de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) et ayant objet de procéder « à l’évaluation administrative de la situation des personnes hébergées, de les informer sur leurs droits et, le cas échéant, d’envisager de les réorienter ».
Vingt-huit associations [/actualites/circulaire-collomb/tri-et-fichage-pour-une-expulsion-rapide-des-refugies-economiques] œuvrant en faveur des droits des personnes admises dans les centres d’hébergement d’urgence ont demandé au Conseil d’État d’annuler cette circulaire et à son juge des référés, saisi selon la procédure de référé-suspension prévue à l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’en suspendre l’exécution en faisant valoir notamment que le dispositif prévu porte « une atteinte grave et immédiate à l’inviolabilité du domicile des personnes admises en centre d’hébergement, à la protection des données personnelles les concernant, ainsi qu’au droit au respect de leur vie privée », reprochant également à la circulaire de porter atteinte « aux droits propres des centres d’hébergement, en leur imposant tant d’accueillir ces équipes mobiles que de leur donner accès aux données qu’ils détiennent ».
Le juge de l’évidence, [CE, ord., 20 févr. 2018, n° 417207, Fédération des acteurs de la solidarité et a. c/ ministre de l’intérieur et a.] considère que les seules informations que les équipes mobiles intervenant dans les centres d’hébergement d’urgence peuvent recueillir sont celles que « les personnes hébergées qui acceptent de s’entretenir avec elles souhaitent leur communiquer » et pour l’accomplissement de leur mission, ces équipes ne disposent « d’aucun pouvoir de contrainte, que ce soit à l’égard des personnes hébergées ou des gestionnaires des centres d’hébergement ».
La circulaire, rappelle par ailleurs le Conseil d’État, n’a pas « pour objet et ne pourrait d’ailleurs légalement avoir pour effet » de dispenser l’administration du respect de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, qui régit la mise en œuvre des traitements de données à caractère personnel et à lumière de cette interprétation de la circulaire, le juge des référés estime que la condition d’urgence à laquelle est subordonné le prononcé d’une mesure de suspension sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative n’est pas remplie. Le recours est donc rejeté.
Cette appréciation ne préjuge toutefois pas de l’appréciation que portera le Conseil d’État sur la légalité de la circulaire qui devrait être examinée à bref délai, dans le cadre du recours en annulation.
Le Défenseur des droits considère, dans un communiqué, que cette décision a « neutralisé l'effet utile de la circulaire » et s'en félicite.