Tennis : La suspension du permis de construire de Roland Garros annulée

Jardin des serres d'Auteuil, dans le bois de Boulogne à Paris.
Jardin des serres d'Auteuil, dans le bois de Boulogne à Paris.

Le juge des référés du Conseil d'État a annulé la suspension du permis de construire pour la restructuration du stade Roland Garros qui avait été ordonnée par le tribunal administratif de Paris.

Par une convention d’occupation domaniale, la ville de Paris a autorisé la Fédération française de tennis (FFT) à occuper les terrains et bâtiments sur lesquels il est envisagé de rénover et d’étendre le stade Roland Garros situé dans le périmètre classé du site du bois de Boulogne et par une décision du 9 juin 2015, prise après autorisation donnée le 5 juin 2015 par la ministre de l’écologie Ségolène Royal sur le fondement de l’article L. 341-10 du code de l’environnement, la maire de Paris Anne Hidalgo a ensuite accordé à la FFT un permis de construire pour la restructuration du stade Roland Garros sur une parcelle située dans le jardin des serres d’Auteuil (création d’un court de tennis de 4 900 places entouré de serres botaniques, ainsi que la démolition de serres techniques, la réhabilitation de deux bâtiments en meulière à usage d’habitation, de bureaux et de stockage avec changement de destination, la démolition d’une cheminée, de souches et d’une mezzanine ainsi que la création d’ascenseurs et de monte-charges).

Un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif de Paris a été formé par la Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France et quatre autres associations qui ont, en outre, demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris de suspendre l’exécution du permis de construire, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative et il y a été fait droit par jugement du 24 mars 2016. La FFT et la ville de Paris se sont pourvus en cassation contre cette décision.

Pour faire droit à la demande de suspension, le premier juge avait estimé que lui « paraissait, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée le moyen tiré de ce que la décision de la ministre de l’écologie [...] autorisant les travaux sur le fondement de l’article L. 341-10 du code de l’environnement avait pour effet de rendre le classement du site pour partie sans objet et serait ainsi l’équivalent d’un déclassement partiel qui ne pouvait résulter que d’un décret en Conseil d’Etat ».

Le classement d'un site, rappelle le Conseil d'ÉtatCE, 2e et 7e SSR, 3 oct. 2016, Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France, Collectif Auteuil les Princes, France Nature Environnement Île-de-France, Vieilles Maisons Françaises et SOS Paris c/ Fédération française de tennis et ville de Paris., n’a ni pour objet ni pour effet d'interdire toute réalisation d'équipement, construction ou activité économique dans le périmètre de classement, mais seulement de soumettre à autorisation tout aménagement susceptible de modifier l'état des lieux et si le ministre chargé des sites peut ainsi, en vertu de l’article L. 341-10 du code de l’environnement, autoriser la modification d’un site classé, sa compétence ne s’étend pas à des mesures qui auraient pour effet de rendre le classement du site sans objet et seraient l’équivalent d’un véritable déclassement, total ou partiel mais pour juger de la légalité d’une autorisation délivrée par le ministre et apprécier si des travaux ainsi autorisés ont pour effet de faire perdre son objet au classement du site, même sur une partie de celui-ci, il appartient au juge administratif, selon la haute juridiction administrative, « d’apprécier l’impact sur le site de l’opération autorisée, eu égard à sa nature, à son ampleur et à ses caractéristiques, en tenant compte de la superficie du terrain concerné par les travaux à l’intérieur du site ainsi que, le cas échéant, de la nature des compensations apportées à l’occasion de l’opération et contribuant, à l’endroit des travaux ou ailleurs dans le site, à l’embellissement ou à l’agrandissement du site ».

Et au cas particulier, pour suspendre l’exécution de la décision contestée, le tribunal administratif de Paris a relevé, d'une part, que le classement du site du Bois de Boulogne par arrêté ministériel du 23 septembre 1957 avait pour objet de faire obstacle à une utilisation de parcelles contraire à son affectation légale de promenade publique et de lutter contre les extensions des concessions et, d'autre part, que le jardin des serres d’Auteuil était compris dans le site classé du Bois de Boulogne, qu’il était séparé du stade Roland Garros par l’avenue Gordon Bennett, qu’il constituait un jardin ouvert au public et affecté à la promenade publique, sans installation sportive, dont le sol et certains bâtiments, notamment la grande serre et les serres principales conçues par l’architecte Jean-Camille Formigé, sont inscrits sur l’inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1998, pour juger qu’était propre à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire le moyen tiré de ce que les travaux autorisés étaient « équivalents à un déclassement partiel du site », il n’a pris en compte que la parcelle objet des travaux autorisés par le permis de construire, située dans le jardin des serres d’Auteuil alors que la superficie concernée par les travaux était faible au regard de l’étendue du site classé et sans même prendre « en considération une compensation prévue par l’opération, consistant en l’ouverture au public, en dehors de la période du tournoi de tennis, d’un parvis en herbe situé dans le stade Roland Garros ».

En bornant son appréciation de l’impact des travaux à la seule parcelle objet des travaux alors qu’elle ne représente qu’une très petite partie du site classé et en ne tenant pas compte des autres aspects de l’opération, martèle le Conseil d'État, le premier juge a commis une erreur de droit qui justifie l’annulation du jugement attaqué.