Avocats : Un contrat de collaboration ne peut servir à contourner la prohibition des contrats de domiciliation

Un avocat a été condamné à payer à son ancienne « collaboratrice et concubine » domiciliée les honoraires convenus, outre 10 000 euros de dommages et intérêts, la restitution des frais de domiciliation et 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
On devine que pour pouvoir prêter serment, le 6 juin 2006, l’une a bénéficié de l’autre d’un contrat de collaboration plus ou moins fictif de deux jours par semaine moyennant une rémunération forfaitaire mensuelle hors taxes de 1.525 euros mais, en réalité, c’est la « collaboratrice » qui devait verser à son confrère/concubin une participation aux « frais » pour être domiciliée au cabinet de son concubin/confrère et élever les « enfants communs » dont le nombre n’est pas précisé.
On comprend aussi en filigrane que c’est à la suite de la « séparation conjugale » que « les relations professionnelles » ont implosé. Il ressort de plusieurs attestations, indiquent les juges d’appel, que « la rupture du contrat de collaboration est intervenue dans des conditions difficilement supportables par Mme X […] dès 2007, M. Y a cessé de lui confier des dossiers, refusé de payer la rétrocession mensuelle d’honoraires, enlevé sa plaque professionnelle au mois de juin 2008 et refusé de lui transmettre le courrier qui lui était adressé personnellement et qu’il lui a interdit l’accès au cabinet au mois de juillet 2008 […] le conflit […] a duré plus de deux ans et […] a été ponctué de nombreux incidents […] Mme X a été suivie par un psychiatre pour un ‘syndrome anxio-dépressif réactionnel à une rupture affective doublé de complications professionnelles’ ».
Toujours est-il que la rupture affective et professionnelle consommée, madame a saisi le bâtonnier
Pas assez pour l'une, trop pour l'autre. Les deux interjettent appel. Madame réclamant également sa rétrocession d’honoraires pour les années 2006 et 2007 et Monsieur demandant la restitution des sommes versées au titre de l’exécution provisoire dans la mesure où « les relations contractuelles ayant existé entre [eux] ont consisté en un contrat de domiciliation, accompagné ponctuellement de relations de sous-traitance, à l’exclusion de tout contrat de collaboration libérale et […] les comptes ont définitivement été apurés entre eux […] la convention de collaboration n’a jamais reçu le moindre commencement d’exécution et qu’en réalité, il s’agissait de permettre à Mme X d’avoir une domiciliation et de travailler à son domicile comme elle le souhaitait de sorte qu’il convient de requalifier le contrat conformément à la volonté commune des parties ».
Pour les juges d’appel
Un contrat de collaboration n'est désormais plus nécessaire pour pourvoir prêter serment — depuis la suppression du stage et l'allongement de la formation initiale de 12 à 18 mois — et le contrat de domiciliation n'est plus banni depuis que le barreau de Paris a lui-même ouvert sa pépinière pour y héberger les « jeunes avocats sans domicile » (cf. "Jeunes avocats: une pépinière pour leur mettre le pied à l'étrier", 21 juin 2009, LBMA) et que les règles du domicile professionnel ont été assouplies (cf. "Vers un assouplissement des règles du domicile professionnel des avocats", 11 févr. 2011, LBMA).