Internet : Jurisystem va devoir trouver un autre nom pour sa plateforme avocat.net

La plateforme avocat.net crée « une confusion dans l’esprit du public » et a « des pratiques commerciales trompeuses » selon le tribunal de Paris qui lui a enjoint sous astreinte, à la demande du Conseil national des barreaux (CNB), de procéder à la radiation de son nom de domaine et de changer de dénomination pour désigner son site.
Dur coup pour la société Jurisystem qui exploite les plateformes juridiques easydroit.fr, code-route.com, centredeformationjuridique.com et avocat.net, cette dernière va devoir, sous astreinte de 150 euros par infraction constatée, procéder — dans un délai de trois mois suivant la signification du jugement — à la radiation de son nom de domaine et faire usage d’une autre dénomination pour désigner son site « de mise en relation d’avocats avec des particuliers à la recherche de professionnels du droit spécialisés dans différents domaines juridiques ».
À l’origine de cette procédure, une demande de la société Jurisystem d’enregistrement de la marque avocat.net en classes 42 (conception et développement d’ordinateurs et de logiciels) et 45 (services juridiques) en mai 2012 considérée comme illicite par le CNB, l’organe représentatif des quelque 60 000 avocats de France, qui lui a adressé une mise en demeure le 29 octobre 2012 et l’a ensuite attraite devant le tribunal de grande instance de Paris par assignation délivrée le 28 décembre 2012.
Bien qu’entre-temps, Jurisystem eût procédé, le 18 novembre 2013, au retrait de sa demande d’enregistrement de la marque avocat.net, le CNB a maintenu sa demande de dommages-intérêts d’un euro et ses autres demandes tendant à faire constater l’usage illicite du titre d’avocat, l’illicéité des conventions de prestations de services internet conclues avec les avocats et du partage des honoraires, des actes de démarchages illicites, une pratique commerciale trompeuse quant à la mention « le comparateur d’avocats n° 1 en France », outre la radiation du nom de domaine et l’interdiction de l’usage de la dénomination avocat.net.
Pour retenir que l’utilisation de la dénomination avocat.net crée effectivement une confusion dans l’esprit du public et lui interdire de continuer à l’utiliser pour désigner son site et lui enjoindre de procéder à la radiation de son nom de domaine, le tribunal
La mention « le comparateur d’avocats n° 1 en France » constitue pour le tribunal, quant à elle, une pratique commerciale trompeuse en application de l’article L. 121-1 du code de la consommation et il lui est fait interdiction de continuer à utiliser ce slogan dans la mesure où la « comparaison » ne porte que sur « les avocats eux-mêmes inscrits sur le site et n’est fondée en pratique que sur le prix », ce qui fait dire au tribunal qu’il s’agit d’une « allégation fausse de nature à induire le consommateur en erreur sur les qualités substantielles du service proposé par la société ».
Le CNB succombe, en revanche, quant au partage des honoraires et au démarchage qu’il reprochait également à la plateforme de mise en relation. Contrairement à ce que soutenait l’instance régulatrice, le tribunal relève qu’aux termes de la convention conclue avec les avocats, la société Jurisystem « perçoit, en rémunération de ses prestations, une somme forfaitaire de 50 euros par "demande de devis achetée sur la plateforme", c’est-à-dire par mise en relation avec un internaute […] due indépendamment de toute perception d’honoraires », ce qui, juge-t-il, ne peut être assimilée à un partage d’honoraires.
De même, une page Facebook et un passage au journal télévisé de France 2 « ne caractérisent [… pas] une offre de services ou une publicité, en vue de donner des consultations, de proposer son assistance ou de rédiger des actes en matière juridique », relève le tribunal pour rejeter les allégations de démarchage illicite alléguées.
Le CNB obtient également un euro de dommages-intérêts « en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession » et 5 000 euros au titre des frais irrépétibles. La décision est assortie de l’exécution provisoire et le tribunal s’est réservé le soin de liquider l’astreinte qui courra pendant deux mois à l’expiration d’un délai de trois mois suivant la signification du jugement.
Sollicitée par LexTimes.fr, la société Jurisytem n’a souhaité ni réagir ni commenter cette décision.