Politique : François Fillon n'obtient pas l'enregistrement du déjeuner des journalistes avec Jouyet

Le tribunal de grande instance de Paris a dit à l'ancien premier ministre François Fillon n'y avoir lieu à référé quant à sa demande de remise, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, par les deux journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme, de l'enregistrement de l'entretien qu'ils auraient eu avec M. Jean-Pierre Jouyet le 20 septembre 2014.
Dans son assignation en référé d'heure à heure délivrée le 12 novembre 2014 pour une audience qui devait se tenir le surlendemain, M. Fillon expliquait qu'il lui était imputé des propos laissant entendre qu'il aurait, lors d'un déjeuner en date du 24 juin 2014, avec Jean-Pierre Jouyet, secrétaire général de la présidence de la République, sollicité « l'Élysée pour accélérer les procédures judiciaires contre M. Nicolas Sarkozy », allégations relayées par le Mondedans son édition des 9 et 10 novembre 2014 qui ont « gravement porté atteinte à son honneur et à sa considération, d'autant [que] les journalistes ont révélé l'existence d'un enregistrement de leur entretien avec M. Jouyet en date du 20 septembre 2014 ».
Sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, le conseil de M. Fillon, Me Jean-Pierre Versini Campinchi, sollicitait la remise de « l'original de l'enregistrement dans sa version intégrale [...] en ce compris, si nécessaire, le support matériel de cet enregistrement » à un tiers indépendant, à charge pour lui d'en établir « une copie conforme [...] aux fins de sa communication à M. François Fillon ».
Réplique du trio de robes noires mené par Me Jean-Marie Burguburu défendant les deux journalistes : l'article 145 ne peut être utilisé préalablement à une procédure de diffamation et la demande se heurte au secret des sources protégé par les article 2 de la loi du 29 juillet 1881 et 10 de la Convention européenne des droits de l'homme. Et c'est ainsi qu'à l'audience de vendredi dernier, les conseils de M. Fillon sollicitaient, à titre subsidiaire, une transcription « de l'enregistrement par le président la juridiction des référés ou l'un de ses assesseurs, pour n'en extraire que les propos relatifs au déjeuner du 24 juin 2014 » destinée à servir de fondement pour une action à l'encontre des deux journalistes sur la base de l'article 1382 du code civil.
La motivation lapidaire du tribunal
Quant à l'action projetée sur le fondement de l'article 1382 du code civil, explique le tribunal à M. Fillon, elle n'est pas « légalement admissible ». La liberté d'expression, dont « les abus » sont prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881, est un droit dont l'exercice ne peut être contesté sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
S'agissant plus particulièrement de la demande subsidiaire voulant mettre à contribution le président, M. Jean-Michel Hayat, ou l'un de ses assesseurs, il ne peut y être fait droit puisqu'en droit de la presse, le juge n'a « aucun pouvoir de provoquer, compléter ou parfaire l'établissement d'une preuve », est-il rappelé.