Conflit d'intérêts : Sanction de 500 000 euros pour Exane dans le dossier Atos

Nicolas Chanut, président d'Exane.

La société de bourse Exane a été sanctionnée à hauteur de 500 000 euros et son président Nicolas Chanut d'un avertissement par l'Autorité des marches financiers pour ne pas avoir agi « d'une manière honnête, loyale et professionnelle » lors de l'acquisition d'une participation dans Atos par une filiale de PAI.

L'affaire remonte au 18 juin 2008 et portait sur l'acquisition, à la demande d'une filiale de Paribas affaires industrielles (PAI), la Financière Daunou 17, d'un maximum de 9 millions de titres Atos à un prix maximum de 38 euros et consistant à « acheter des titres au fil de l'eau au prix actuel du marché, négocier les blocs [...] au meilleur prix et organiser un "reverse book building" sur la quotité restante sur la base d'un prix à convenir », qui sera fixé à 39 euros le lendemain, 19 juin à 17h36.

Parmi les nombreux griefs notifiés à la société Exane et à son président Nicolas Chanut par le gendarme de la bourse dans le cadre de cette affaire, la commission des sanctions en a retenu seulement deux dans cette décision rendue le 14 juin 2012 qui met hors de cause la société de gestion Boussard & Gavaudan et son président Emmanuel Boussard.

Le premier grief vise l'article 315-15 du règlement de l'AMF qui impose la mise en place « de procédures connues sous le nom de "muraille de Chine" pour prévenir la circulation indue d'informations confidentielles », les vendeurs Exane n'auraient dû être informés, rappelle la commission des sanctions, « en temps réel que des phases successivement mises en œuvre et non, dès le premier jour, de l'intégralité de l'opération ». Et il est également relevé que la liste d'initiés prévue à l'article L. 621-18-4 du code monétaire et financier n'a pas été établie.

Le second grief, plus grave, vise la détection des conflits d'intérêts et le non-respect du principe de primauté de l'intérêt du client. En l'espèce, Exane a annulé rétroactivement une cession de 148 453 titres Atos par Exane AM à 35,95 euros intervenue le 19 juin à 09h22 pour y substituer une cession, qui aurait eu lieu le même jour à 17h57 et au prix de 39 euros, des mêmes titres, censés avoir été apportés par Exane AM en bloc, après la clôture du marché. De même, Exane a décidé de ne pas remplir le ticket de transaction correspondant à l'achat de 75 000 titres Atos qu'elle a réalisé au cours de 36,40 euros auprès du hedge fund Calypso le 19 juin à 15h33, pour reporter artificiellement l'acquisition de ces titres après clôture à 39 euros.

La société Boussard & Gavaudan et son président Emmanuel Boussard ont été mis hors de cause dans ce dossier car, un mois plus tôt, M. Boussard a été relaxé par le tribunal correctionnel de ParisTGI Paris, ch. corr., 11 mai 2012, ministère public c/ Emmanuel Boussard. du chef de délit d'initié pour les mêmes faits au motif « qu'il n'est pas suffisamment établi [...] qu'en passant l'ordre d'achat de 28 798 titres Atos, [il] ait eu conscience de détenir une information privilégiée  ». M. Boussard avait en effet été averti, à 17h36m27s, par un vendeur d'Exane, de l'opération qui portait sur 5 millions de titres à 39 euros et, à 17h39m53s, il donna un ordre d'achat portant sur 50 000 titres Atos qui lui permit d'en acquérir, juste avant la clôture du marché électronique, 28 798 au prix de 36,80 euros.

Sur les recours formulés par la société Exane et M. Chanut, le Conseil d'ÉtatCE, 6e et 1e sous-sect., 26 janv. 2015, n° 360933, 361999 et 362000, société Exane et Nicolas Chanut c/ président de l'autorité des marchés financiers. a jugé qu'en leur infligeant une sanction pécuniaire de 500 000 euros et un avertissement respectivement, et en décidant la publication de sa décision sur son site internet, la commission des sanctions n'a pas « infigé de sanctions disproportionnées, tant au regard de la gravité et de la nature des manquements reprochés qu'au regard de l'exigence de répression des manquements commis par les prestataires d'investissement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles ».