Information privilégiée : Sanction 3 fois supérieure au profit réalisé pour un avocat

La commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) a infligé une sanction pécuniaire à l’avocat parisien Michaël Sicakyuz et à son frère, Azad, de 12 000 euros et 50 000 euros respectivement pour utilisation d’une information privilégiée à l’occasion de l’acquisition en 2011 de la petite société Cybernétix par le groupe Technip.

Le gendarme de la bourse reprochait à Michaël Sicakyuz d’avoir acheté 740 titres Cybernétix le 14 octobre 2011 et de les avoir revendus le 18 novembre 2011 avec une plus-value de 4 077 euros. Quant à son frère Azad, ce sont 2 559 titres qu’il a acheté entre le 6 et le 12 octobre 2011 avec 35 000 euros que lui aurait fourni son frère et qu’il a revendu les 9 et 22 novembre 2011 avec une plus-value de 17 044 euros.

L’entrée en négociation exclusive concernant l’acquisition par Technip de la participation des actionnaires de référence (45,7 %) à 19 euros, soit une prime de 36 % par rapport au dernier cours de bourse, a été annoncée le 4 novembre 2011 par un communiqué commun des deux sociétés mais le projet avait été évoqué lors d’un conseil d’administration de Techniq qui s’est tenu le 25 juillet 2011.

Qui a informé qui ?
Aucune certitude à ce sujet mais plusieurs indices sont mis en avant par la commission des sanctions pour estimer que « seule la détention de l’information privilégiée du rachat de Cybernétix par Technip permet d’expliquer l’acquisition par [l’un et l’autre] des titres Cybernétix revendus en réalisant une plus-value ».

Parmi les nombreux indices relevés par les enquêteurs et retenus par la première section de la commission des sanctions dans cette décision rendue le 9 juillet 2014, l’amitié forte existant depuis leurs études en 1994 entre Michaël Sicakyuz et le juriste chez Technip en charge des fusions, acquisitions et restructurations, la sœur du premier a par ailleurs été l’assistante du second pendant la période litigieuse du mois d’août 2011.

Mais également le fait notamment qu’Azad Sicakyuz n’était jamais intervenu en bourse. Il a ouvert un compte-titres, le 12 septembre 2011, chez Boursorama qu’il a alimenté, le 5 octobre 2011, avec des fonds reçus de son frère Michaël, le 30 septembre 2011, sur son compte chez HSBC. Après avoir acheté et revendus les titres Cybernétix, Azad a ensuite fait, le 8 décembre 2011, un virement de 43 150 euros au profit de son frère et, le 12 avril 2012, il a clôturé son compte-titres chez Boursorama.

Pour leur infliger une sanction pécuniaire d’un montant trois fois supérieur au profit réalisé, l’AMF tient compte de la gravité des manquements commis mais qu’en l’espèce, l’un vend des produits de capitalisation et d’assurance-vie chez Allianz et l’autre est avocat depuis 1996, titulaire d’un DEA de droit de l’entreprise (1993) et d’un doctorat de droit (1995) de l’université Paris-Dauphine et qu’il a en outre suivi un module de droit boursier.

Sollicité par LexTimes.fr, Me Sicakyuz nous indique qu’après en avoir discuté avec son conseil, Me Emmanuel Marsigny, il a l’intention d’interjeter appel de cette décision dans la mesure où il « conteste formellement les griefs injustifiés qui sont retenus ».

Selon un arrêt rendu le 18 février 2016 que nous a transmis Me Sicakyuz le 24 octobre 2017, la cour d'appel de ParisParis, ch. 5-7, 18 févr. 2016, n° 2014/19088, Michaël et Azad Sicakyuz, en présence de l'Autorité des marchés financiers (AMF). a rejeté les recours des frères Sicakyuz, enjoint l'AMF d'anonymiser la décision du 9 juillet 2014 et les a condamnés aux dépens.

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