Emprunts : Examen d’office par le juge du caractère abusif d’une clause contractuelle

BNP Paribas.

Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont « abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat », a jugé la Cour de cassation dans deux arrêts distincts concernant des prêts consentis par BNP Paribas libellés en francs suisses et remboursables en euros.

Dans les deux cas il s’agissait de prêts Helvet Immo libellés en francs suisses et remboursables en euros, consentis en 2008/2009 par BNP Paribas Personal Finance, contractés par des Français domiciliés en France et destinés à l’acquisition d’un bien immobilier en France mais à la suite d’une fluctuation de la parité CHF/EUR qui leur était défavorable, la responsabilité de la banque était recherchée dans l’un et l’autre cas par les emprunteurs pour manquement de la banque à son devoir d’information et de mise en garde bien que dans un des deux dossiers, les emprunteurs pouvaient être considérés comme particulièrement « avertis » pour avoir exercé les fonctions de directeur-adjoint des opérations d’une chambre de compensation après celles de commis d’agent de change.

Le moyen, visant la validité de la clause d’indexation fondée sur une monnaie étrangère qui doit être « subordonnée à l’existence d’une relation directe avec l’objet de la convention ou l’activité de l’une des parties » selon l’article L. 112-2 du code monétaire et financier, jugée licite par les juges du fond, est écarté par la première chambre civile de la Cour de cassationCiv. 1re, 29 mars 2017, n° 15-27231, Philippe X c/ société BNP Paribas Personal Finance ; n° 16-13050, Bruneau et a. c/ société BNP Paribas Personal Finance et a. qui casse toutefois l’arrêt, au visa de l’article L. 132-1 (devenu L. 212-1) du code de la consommation selon lequel « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat », en citant expressis verbis la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui a eu l'occasion de dire pour droit que le juge national est tenu « d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu’il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l’applique pas, sauf si le consommateur s’y oppose »CJUE, 4e ch., 4 juin 2009, n° C-243/08, société Pannon GSM Zrt c/ Erzsébet Sustikné Győrfi..

Toute dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence, selon les contrats litigieux, souligne la Cour de cassation, « d’augmenter le montant du capital restant dû et la durée d’amortissement d’un délai maximum de cinq ans » et il incombe donc aux juges du fond de « rechercher d’office, notamment, si le risque de change ne pèse pas exclusivement sur l’emprunteur [créant] un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».